“The Gentlemen“ - 
Un film de Guy Ritchie - Sortie DVD VOD

Cannabis

Il ne s’agit pas ici de faire pousser du cannabis sur son balcon pour sa consommation personnelle ou pour fournir son entourage plus ou moins proche, mais bien plutôt de faire tourner des fermes cachées sous la surface de la campagne anglaise… Mickey Pearson, après avoir trafiqué avec succès de l’herbe dans la cour de son université quand il était étudiant, réussit avec le temps à asseoir sa position dans le milieu. Il devient, dans la force de l’âge, l’un des grossistes les plus en vue dans le milieu. Sa stratégie consiste, moyennant contributions financières généreuses, d’occuper les entrailles de vastes terres de la noblesse anglaise pour cultiver à perte de vue de la marijuana en quantité massive. Le baron du trafic de cannabis en costume trois-pièces a réussi à se fondre dans la bonne société anglaise pour proposer un mécénat tout particulier à des descendants sans le sou. Ces derniers sont prêts à toutes les compromissions pour pouvoir conserver leur domaine et entretenir leur manoir. Ces échanges de bons procédés ont permis à Mickey Pearson d’implanter une douzaine de fermes mastodontes, hautement technologiques, qui produisent jusqu’à cinquante tonnes de cannabis par an… Tout va pour le mieux pour Mickey jusqu’au moment ou il décide de prendre sa retraite cannabique et de vendre l’ensemble de ses installations pour la somme totale et conséquente de quatre cents millions de livres…

Mais quand le roi de la jungle décide de se retirer avec sa reine, la place laissée vacante devient alors source de toutes les convoitises, et l’on est prêt à s’étriper pour récupérer ce business très lucratif, et s’asseoir sur une mine d’or vert… La première personne sur les rangs est un homme bien comme il faut, loin du milieu du deal, mais un homme d’affaires averti qui a senti le bon filon. Il a le privilège de pouvoir visiter l’une de ces fermes mais s’inquiète alors de ce qu’il adviendra quand le cannabis sera légal en Angleterre, ce qui ne saurait tarder lui explique Mickey. La fin de la prohibition constituera alors une aubaine pour le futur acquéreur. Il faudra alors montrer patte blanche aux autorités, ce qui n’est plus le cas de Mickey, qui a du sang sur les mains, d’où les raisons du choix de se retirer. La retraite a du bon, nous dit-il, et il la mérite… Malheureusement pour Mickey, le riche homme d’affaires intéressé par ce cannabusiness fera tout pour que le bien qu’il compte acheter soit déprécié, au plus vite, afin d’en réduire la valeur, et donc le prix d’achat au moment de boucler la transaction. Cependant, on ne trompe pas aussi facilement un aussi gros gibier, avec autant d’expérience, et surtout on ne se moque pas de lui insidieusement, et on ne lui tire pas dans le dos, au risque d’y laisser une partie de son anatomie. Mickey Pearson, sous des allures de gentleman, est loin d’être un enfant de cœur, et tous ceux qui se dresseront devant lui en feront les frais…

La deuxième gentleman à se mettre sur les rangs, pour racheter l’ensemble de la super structure, est un caïd ambitieux, visiblement membre d’une triade chinoise, et sous la coupe d’un vieux sage. Il s’agit de Lord George, vendeur d’héroïne, dont il aimerait qu’il passe enfin la main… Dry Eye, c’est ainsi qu’il se fait appeler, n’hésite pas alors à affronter Mickey chez lui en le menaçant d’employer la force s’il n’accepte pas la proposition de rachat, qu’il estime pourtant généreuse… Malheureusement pour lui quand le lion est mal luné, peu disposé aux avances, qu’il se sent menacé et surtout que sa lionne est malmenée, il fait plus que de rugir et fera le nécessaire pour montrer qui est le plus fort. Comme il le dit si bien : « Pour être le roi de la jungle, il ne suffit pas de jouer les rois. Il faut être le roi. Sans l’ombre d’un doute. Le doute entraîne le chaos et sa propre chute. ». Tant que cet empire n’est pas vendu, il faut garder la main sur le business, et déjouer tous les pièges que lui tendront les prétendants au trône…

Dans un film où les big boss du trafic se promènent en costard cravate, et où les petits caïds s’agitent en survêtement, on aura l’occasion de croiser :

  • un journaliste scénariste maître chanteur qui se positionne en indic de truand et espère être gracieusement rémunéré ; un directeur de presse revanchard ;
  • un coach de jeunes de cité qui tente d’éduquer des adolescents de quartiers populaires, qui auraient vite fait de basculer du mauvais côté de la loi, en leur inculquant des valeurs et le sens du combat ;
  • un homme de main maniaque en propreté, très classe lui aussi, qui manie avec beaucoup de dextérité le verbe et le fusil-mitrailleur, et n’hésite pas à faire la morale à des jeunes héroïnomanes fils à papa ;
  • un vendeur d’opiacés chinois à qui l’on n’hésite pas à rappeler que le thé est une drogue, et que l’on culpabilise pour le potentiel de mortalité du produit qu’il vend ; des horticulteurs qui aiment la baston ;
  • et enfin une reine lionne en talon aiguille qui mène sa barque et sait manier le presse-papiers comme personne…

Tout ce beau petit monde haut en couleur, en préjugés, et en armes devra faire avec les lois d’une jungle du narcotrafic où tous les coups sont permis pour se faire une place au soleil. La gentleman attitude n’est qu’une façade pour annoncer poliment et avec la manière le mal que l’on va se faire…

Thibault de Vivies