La consommation d'alcool mieux prise en compte sur les lieux de travail

Les 24 et 25 mars 2022, s’est tenu le congrès de la Société française d’alcoologie (SFA). A cette occasion, le Dr Philippe Hache, conseiller médical à l’Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (l’INRS) a présenté les résultats d’une enquête menée à l’automne 2021 auprès des services de prévention et de santé au travail, de la fonction publique et de la Mutualité sociale agricole.

Cette enquête montre que la consommation d’alcool en particulier et les conduites addictives en général sont désormais mieux prises en compte par les médecins du travail, une bonne nouvelle pour un sujet qui reste encore tabou.

Médecins du travail, infirmiers, psychologues et ergonomes du travail ont été interrogés. Plus d’un tiers était formé en addictologie. Parmi les substances qui posent le plus problème, ils citent à 91,3% l’alcool, 65,9% le tabac, 63,9% le cannabis et 43% les médicaments psychotropes.

La consommation d’alcool est la 5e préoccupation en entreprise derrière les risques psycho-sociaux, les troubles musculosquelettiques et lombalgies, les accidents du travail et les maladies professionnelles.

Une évolution significative est soulignée par cette enquête : les ¾ des médecins du travail interrogent les salariés sur leur consommation d’alcool de manière systématique. Ils étaient 46% auparavant.

Il manque toutefois un vrai lien solide entre les médecins du travail et les structures hospitalières ou spécialisées en addictologie, avec seulement 20% des services de prévention et santé au travail qui collaborent en réseaux avec ces structures, contre 28-29% en 2009.

« L’enquête ne permet pas d’expliquer cette régression mais on peut supposer soit un manque de disponibilité des structures ou un recours moins fréquent » selon le Dr Philippe Hache.

Il y a également un changement de la perception des usages d’alcool chez les médecins du travail. 80% d’entre eux estiment qu’une consommation de moins de deux verres par jour est déjà pénalisante dans le travail.

Il est également important pour les services de prévention et santé au travail de prendre en compte les difficultés inhérentes au travail dans l’augmentation des consommations de substances : risques psychosociaux, horaires atypiques (travail de nuit, les dimanches et les jours fériés), les pots, congrès et séminaires, le travail isolé et le télétravail. 90,7% des professionnels considèrent que des facteurs liés au travail jouent sur les conduites addictives.

S’il faut mener davantage d’études sur le télétravail qui s’est fortement accru avec la crise sanitaire, il a néanmoins augmenté la durée du travail. Or, celle-ci est corrélée à la consommation de substances. Parmi les professionnels interrogés, 45% disent avoir vu une augmentation de la consommation d’alcool chez les salariés qu’ils suivent.

Cette enquête confirme que les pratiques addictives représentent une problématique fréquemment rencontrée en milieu professionnel à laquelle les services de prévention et santé au travail se sont adaptés mais les formations en addictologie doivent être renforcées, a conclu le Dr Phillipe Hache. Un article avec l’ensemble des données publié en juin 2022 dans Références en santé au travail, a-t-il indiqué.

Il est temps désormais de porter cette problématique au sein des équipes dirigeantes et managériales.

Pour plus d’informations sur les conduites addictives en milieu professionnel, rendez-vous sur notre page de fiches pratiques sur Addict’AIDE Pro.

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