Cinéma / “Climax“ Un film de Gaspar Noé

Alcool

Quelques années après “Enter the void“, qui allait chercher du côté des substances hallucinogènes comme la DMT, le réalisateur Gaspar Noé, nous propose dans ce film, sur les écrans depuis le 19 septembre, un trip collectif à ce qui pourrait être du LSD d’après ce que nous en disent les protagonistes.

Nous sommes en 1996. Ca commence par une série de vidéos où une quinzaine de danseurs s’expriment face caméra sur, entre autres, leurs motivations à participer à un projet de spectacle de danse qui les embarquera, si tout se passe bien, dans une tournée européenne et américaine, le rêve de beaucoup semble-t-il. Ces jeunes gens, hommes et femmes, sont rafraichissants et charmants et montrent une certaine candeur. Ils sont jeunes et beaux et assez sages quand on leur parle de drogue. Même si tous n’en parlent pas, certains osent à peine dire qu’ils ont sniffé une fois un rail de cocaïne avec une amie ou qu’ils consomment un peu de cannabis comme relaxant musculaires avant de danser. L’une des danseuses, allemande probablement, explique qu’elle préfère venir danser en France car à Berlin il y a trop de drogues, et qu’un ami à elle va même jusqu’à utiliser les LSD en collyre pour les yeux… Bref, rien ne semble prédisposer ces danseurs et danseuses à consommer à outrance. Leur trip à eux, c’est la danse, et ils excellent dans leur discipline comme on peut le constater au début du film dans un plan séquence dansé jubilatoire tant il célèbre la vie de ces corps.

Après une semaine de répétition, une fête bon enfant est organisée dans ce qui semble être une vieille salle des fêtes un peu décrépie et assez lugubre. La piste de danse est au centre de tout. Sur le côté un petit buffet est installé avec comme seul alcool servi, un bol de sangria. Tout le monde, ou presque, se sert sans que ce soit dans un objectif de défonce, défonce qui semble même bannie de cette fête. Preuve en est que quand les participants se rendent compte qu’un produit a été rajouté à leur insu dans la sangria et que les effets commencent à monter, ils se jettent tous agressivement sur le supposé fautif qu’ils répudient illico presto.

Malheureusement, même si ça ne semble pas être l’intension d’un réalisateur qui a plutôt la fibre subversive, on a vite fait ici de plonger dans ce qui pourrait être identifié à une campagne de prévention surréaliste où tout est dit ou montré pour nous faire croire que la consommation de drogues, en l’occurrence du LSD, conduit les êtres humains au pire en exacerbant leurs instincts et peurs les plus primaires. Attention, le “bad trip“ n’est en aucun cas une constante dans les usages de ces produits-là, même si l’on sait que l’état de stress dans lequel peut se retrouver un usager apprenant qu’il a consommé un produit à son insu, peut influencer négativement l’expérience.

Toute la première partie du film nous donne à entendre les frustrations sexuelles et sentimentales de chacun, ainsi que les tensions sous-jacentes dans un groupe dont les membres se connaissent encore mal, et se cherchent. Toute la deuxième partie est elle alors une “démonstration“ à peine appuyée par un jeu un peu forcé des effets du LSD sur le cerveau et les corps alors déséquilibrés. Bien entendu, tous les danseurs et danseuses ne réagiront pas de la même manière, mais sont essentiellement mis en avant une sorte d’agressivité prononcée dans les paroles et les actes et des désirs sexuels plus qu’assumés publiquement. Une chose est sûre, le réalisateur a décidé de s’attarder sur les consommateurs pour lesquels le produit ne fait pas de bien, plutôt le contraire. Les autres usagers, c’est à dire ceux qui profitent d’un trip apparemment moins destructeur, ne font que de la figuration.

Au petit matin, les portent s’ouvrent sur des secours qui viennent, comme le spectateur, faire le compte des “cadavres“ comme on compterait les bouteilles de bière ou de vin qui jonchent le sol d’une soirée bien arrosée…