Écrans – Sortir de l'addiction

Pour Protéger les enfants

Le débat sur l’addiction aux écrans dans la petite enfance est vif depuis la médiatisation d’une possible relation entre l’exposition aux écrans et sa responsabilité éventuelle dans l’augmentation de l’incidence des troubles comportementaux, dont les troubles du spectre autistique (TSA).

L’exposition des enfants de moins de 3 ans aux différents écrans (télévision, tablette et smartphone) a été considérée comme responsable d’un « autisme virtuel » après une communication de lanceurs d’alerte en 2017. L’implication des écrans dans le retard de développement est une piste à considérer devant le constat d’une exposition trop précoce malgré les recommandations disponibles (aux États-Unis, 68 % des enfants de moins de deux ans sont exposés aux écrans en moyenne deux heures par jour). La confusion autour du diagnostic d’autisme ou de TSA est à souligner, l’autisme, contrairement à la durée d’exposition aux écrans, touche en effet des familles indépendamment du niveau socio-économique. Outre ce premier point, le concept « d’autisme virtuel » ne repose aujourd’hui sur aucune base scientifique et la démarche des lanceurs d’alertes ne permet pas d’éliminer des biais dus à des facteurs confondants.

Les actions en faveur de la lutte contre les drogues et les conduites addictives citent les pratiques excessives de jeux, de l’internet et des écrans à partir de 2013. Le risque d’addiction numérique a également été évoqué la même année dans le cadre de travaux parlementaires de l’Assemblée Nationale. Le médecin-chef de l’hôpital Marmottan rapporterait une augmentation des consultations pour « addiction » aux jeux, à la fréquentation de sites pornographiques. Surtout, il mettait en exergue que les adolescents sont, à l’ère de l’internet, les « cibles » des marchands et des sociétés qui privilégient l’offre d’applications « addictives » et à but mercantile. Enfin, l’Académie de Médecine a rendu un avis dans lequel elle dresse un réquisitoire contre l’exposition passive aux écrans.

Ce sont les enfants et les adolescents des classes défavorisées qui sont le plus à risque d’addiction aux écrans. Les familles aisées opèrent un meilleur contrôle des usages des smartphones. Les études réalisées par Common Sense démontrent, par exemple, que la durée d’exposition aux écrans est deux fois plus importante chez les enfants afro-américain. En matière d’éducation, un débat est en train de naître aux États-Unis entre les défenseurs de l’introduction des écrans et donc de l’accès à l’internet dans l’éducation et ses détracteurs qui invoquent le risque d’addiction aux écrans chez les plus jeunes. Les parents appartenant aux classes les plus aisées, et parmi eux de nombreux cadres de la Silicon Valley, inscrivent désormais de préférence leurs enfants dans les écoles qui n’utilisent pas les cours en ligne et les écrans. Cette tendance contrecarre les efforts de certains états qui visent à généraliser le télé-enseignement et l’usage des ordinateurs et des tablettes en classe. Le débat n’est pas tranché.

Les actions à mener

En novembre 2018, le Sénat a adopté en première lecture une proposition de loi visant à lutter contre l’exposition précoce des enfants aux écrans. La loi prévoit la diffusion de messages avertissant des dangers des écrans pour le développement des enfants de moins de trois ans. Le vote a fait suite à la publication du rapport de Mme Catherine Morin-Dessailly.

La proposition de Loi votée par le sénat cible la prévention des « effets néfastes » de la surexposition chez les enfants de moins de trois ans, mais n’aborde pas stricto sensu la question de l’addiction à l’internet et au smartphone qui touche les enfants plus âgés.

La règle « 3-6-9-12 » promue par Serge Tisseron dès 2008 est rappelée :

  • pas d’écran avant 3 ans, ou tout au moins les éviter le plus possible.
  • pas de console de jeu portable avant 6 ans, car dès que les jeux numériques sont introduits dans la vie de l’enfant, ils accaparent toute son attention aux dépens des autres activités.
  • pas d’Internet avant 9 ans, et une utilisation d’Internet en présence des parents jusqu’à l’entrée en collège.
  • usage autonome d’internet à partir de 12 ans en veillant à un accompagnement effectif des parents.

Le groupe de pédiatrie générale de l’Union Nationale des Associations Familiales a par ailleurs réalisé un guide qui précise que 22 % des 7-12 ans possèdent un smartphone et 36 % une tablette. L’UNAF est partenaire du consortium qui a développé en 2008 le site pedagojeux.fr (http://www.pedagojeux.fr) et internetsanscrainte (http://www.internetsanscrainte.fr).

La Caisse d’Allocations Familiales, en partenariat avec le Centre pour l’éducation aux médias et à l’information (Clémi), propose également sur son site une série de courtes vidéos pédagogiques : « La famille Tout-Ecran ».

L’application Xooloo est destinée aux pré-adolescents et adolescents jusqu’à 12 ans. Disponible depuis novembre 2018, elle est présentée sous la forme d’un « coach numérique » qui a pour ambition d’aider les enfants à réguler leurs usages sans avoir nécessairement à impliquer directement les parents. En pratique, l’application parentale est synchronisée avec les appareils des enfants et permet une surveillance de leurs habitudes, le but visé étant de favoriser l’autonomie numérique. L’application pour enfants est paramétrable, comprend un contrôle parental des accès et permet de changer l’interface utilisateur et d’introduire des quotas et des limites d’usage. L’application pour les parents permet de gérer le paramétrage. L’application est payante sur abonnement, entre 30 et 60 € par an selon les formules. L’application est intégrée à l’offre d’opérateurs (Bouygues Telecom, SFR et Orange) avec un coût d’abonnement réduit (3,5 € par mois en illimité chez Orange).

Une formation spécifique des pédiatres et pédopsychiatres est nécessaire étant donné l’apparition précoce, voire très précoce des troubles décrits ci-dessus, très souvent intriqués avec des troubles psychologiques et des relations sociales. Il convient de former spécifiquement ceux qui rencontrent en premier ces enfants en difficulté : les pédiatres, les pédopsychiatres et les psychologues. Les autres addictions sont essentiellement des problèmes d’adultes ou d’adolescents plus âgés : donc les structures addictologiques classiques, et même les CJC ne répondent pas à ce nouveau besoin.

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