Par Paul Brunault
Les troubles lies à l’usage de l’alcool, et notamment les alcoolisations aigues, représentent un des principaux motifs d’admission aux urgences.
L’existence d’un trouble de l’usage de l’alcool expose à un risque majoré de réadmission aux urgences (comparativement à la population générale), mais nous ne connaissons pas encore bien les facteurs associés à ce risque de rechute. Avant de présenter les résultats de cette étude, nous pouvons rappeler que l’alcool est responsable d’un décès sur 7 chez les hommes et d’un décès sur 13 chez les femmes (chez les 15-64 ans).
L’originalité du travail de ces cliniciens italiens a été de considérer non pas un seul facteur de risque de rechute isolément, mais d’essayer de rendre compte d’un risque global de réhospitalisation pour le même motif, en prenant en compte plusieurs de ces facteurs. L’objectif de ce travail était de préciser la part relative de différents facteurs de risque dans le risque de rechute, et de proposer un score global permettant de mieux appréhender ce risque.
En se basant sur les données obtenues auprès de l’ensemble des patients hospitalisés dans le service d’urgences de Bologne en 2014, ces auteurs ont identifié plusieurs facteurs de risque indépendants permettant de prédire le risque de réhospitalisation aux urgences pour alcoolisation aigue.
Trois types de facteurs ressortaient de manière significative : (1) un antécédent d’abus d’alcool, (2) des antécédents de traumatismes physiques (i.e., chute, fracture, …) ou de troubles psychiatriques et (3) une situation sociale particulière (i.e., être soit sans domicile fixe, soit incarcéré). En prenant en compte tous ces paramètres, le score obtenu permettait de prédire de manière significative le risque de réhospitalisation aux urgences pour le même motif au cours de l’année à venir. Dans le groupe identifié comme à haut risque (présence de trois de ces trois facteurs), le risque de réhospitalisation pour alcoolisation aigue était de 20% dans les 10 jours faisant suite à l’hospitalisation initiale, et de 50% dans les 6 mois faisant suite à l’hospitalisation initiale.
Ce travail apporte des pistes de réflexion pour mieux cibler, parmi les personnes hospitalisées aux urgences pour une première alcoolisation aigue, lesquelles sont à plus fort risque de rechute et pour lesquelles il conviendrait de proposer une prise en charge multidisciplinaire plus intensive. Ce travail confirme l’intérêt d’une approche addictologique prenant en compte à la fois les facteurs de vulnérabilité individuels (addiction, troubles psychiatriques, mais aussi traumatisme physique) et sociaux (situation sociale) dans l’évaluation de ce risque de rechute.