Alcoolisme et toxicomanie: le graal de l'abstinence totale remis en question

Le premier Forum européen sur les addictions et la société se tient ces 16 et 17 octobre à Bruxelles. Près de 130 spécialistes et acteurs de terrain belges et étrangers s'y sont donnés rendez-vous pour dresser un état des lieux. Ils constatent que la prohibition coûte chaque année des centaines de millions d'euros. Pourtant, la drogue n'a jamais autant circulé, sans compter l'alcool.

Alcool

Les choses évoluent aujourd’hui dans le domaine des addictions. Plusieurs pays légifèrent pour dépénaliser le cannabis. C’était il y a quelques jours pour le Canada. Le Portugal a lui dépénalisé toutes les drogues pour les consommateurs, mettant le focus sur la prévention et à l’accompagnement du malade. La Suisse, l’Uruguay ont aussi changé leurs lois.

Chez nous, aussi les choses bougent. Nous nous sommes immergés dans un centre de jour bruxellois dédié aux dépendances. A « L’Orée », une quarantaine de patients, tous dépendants, arrivent le matin et repartent le soir. Accros à la drogue ou alcooliques, ils sont libres de suivre les activités.  Pas question de contrat d’abstinence pour pouvoir bénéficier de l’accompagnement par une équipe multi-disciplinaire, psychologues, psychiatres, ergothérapeutes, assistants sociaux.

Des dépendants racontent leur enfer

Notre équipe est plutôt bien accueillie par les résidents. Certains acceptent de témoigner mais sous couvert d’anonymat. « Je ne voulais pas d’un centre fermé, où on ne peut pas sortir, où on n’a pas de contact avec sa famille et ses proches » nous lance d’emblée, Christine* qui est arrivée à l’Orée, il y a seulement deux mois.

Marie* ajoute quant à elle : « Je suis arrivée, il y a un an et demi. Je pense que c’est un chemin qui a vraiment du sens. J’ai beaucoup avancé dans mon combat ».

Christine vit avec l’alcool depuis longtemps, ses propres parents buvaient. Boire semblait normal pour elle. Mais, la vie est rapidement devenue un enfer. « J’ai eu un cancer du sein et j’ai dû subir des traitements. Mais je rentrais de chimiothérapie et je buvais ma bouteille. Si vous buvez une bouteille de Cava toute seule, vous êtes déjà bien arrangée. Parfois, c’était même à jeun. Le lendemain d’une soirée alcoolisée, je me levais à midi ou à 14 heures, parfois plus tard, je ne voyais même plus la journée passer. Là, je me suis dit : ce n’est plus possible ».

Accro au Crack en 10 jours 

Marie est polytoxicomane, elle a déjà fait neuf cures de désintoxication avant d’aboutir à « L’Orée ». Elle vient d’un milieu plutôt aisé et a commencé à se droguer à 25 ans. « Le début, ça a été le Crack (NDLR : un dérivé très puissant de la cocaïne). En 10 jours, j’étais dedans. En 10 jours, j’étais une toxicomane. L’état d’esprit change, plus rien n’a d’importance sauf le Crack. La famille, les amis, l’argent, l’hygiène, les habitudes, tout passe après. »

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