Baclofène et alcool : oui à sa prescription mais à certaines conditions

Dix ans après la publication en 2008 du livre Le dernier verre du cardiologue Olivier Ameisen, le baclofène est toujours un sujet de vifs débats en France où la polémique prend malheureusement trop souvent le dessus sur les faits scientifiques. À l’origine, ce médicament est commercialisé dans le traitement des contractures musculaires douloureuses notamment dans la sclérose en plaque.

Alcool

Dix ans après la publication en 2008 du livre Le dernier verre du cardiologue Olivier Ameisen, le baclofène est toujours un sujet de vifs débats en France où la polémique prend malheureusement trop souvent le dessus sur les faits scientifiques. À l’origine, ce médicament est commercialisé dans le traitement des contractures musculaires douloureuses notamment dans la sclérose en plaque. Mais depuis maintenant 10 ans, plus de 200 000 patients ont expérimenté ce médicament avec l’objectif de devenir indifférent à l’alcool. L’enjeu de santé publique est de taille puisqu’il faut rappeler que 5 à 8 millions de Français présentent un usage régulier d’alcool, 2 à 3 millions ont des difficultés avec et qu’au moins 49 000 décès évitables sont imputables à l’alcool. Cancers, maladies cardio-vasculaires, cirrhose du foie sont parmi les complications les plus graves d’un abus régulier d’alcool.

Cette ancienne molécule a suscité et suscite toujours donc de nombreuses attentes des patients, de leur entourage et des professionnels de santé. Des associations de patients mais aussi des réseaux de médecins orientés sur la promotion de l’usage du baclofène se sont structurés pour accompagner les médecins dans la spécificité de sa prescription.

Mais, comme pour tout médicament, il faut apporter la preuve scientifique de l’efficacité du baclofène. En attendant les résultats de deux études cliniques françaises, l’agence du médicament (ANSM) a proposé d’encadrer ces prescriptions hors autorisation en créant en 2014 un nouveau statut pour la molécule : une recommandation temporaire d’utilisation(RTU) basée sur une présomption d’efficacité, dans l’attente de résultats scientifiques venant conforter un rapport bénéfice-risque favorable. À l’issue des trois années de RTU, le laboratoire Ethypharm a déposé en avril 2017 une demande d’autorisation de mise sur le marché pour un médicament contenant du baclofène dans l’indication de la réduction de la consommation d’alcool.

Peu de médicaments n’auront bénéficié d’autant d’attentions de la part de l’agence du médicament : recommandation temporaire d’utilisation avec plusieurs réunion de comités scientifiques depuis 2014, réunion en 2018 d’un comité scientifique constitué d’experts européens du bénéfice-risque du médicament, et enfin une commission ad hoc pluridisciplinaire les 3 et 4 juillet 2018 pour statuer plus largement sur la question de son utilisation. Habituellement, les conclusions négatives sur le bénéfice-risque d’un médicament interrompent le processus mais la réalité de l’usage français devait être prise en compte dans le processus décisionnel. Il faut noter par ailleurs qu’aucune demande d’autorisation n’a été déposée dans un autre pays européen.