L’ERN ou « négativité liée à l’erreur » est une onde particulière visible sur un électro-encéphalogramme (EEG) -dispositif utilisé pour mesurer l’activité électrique cérébrale- survenant après une erreur motrice. Le fait que les neurones « voient » l’erreur, permettrait de corriger un comportement avec une certaine flexibilité, ce qui serait utile pour ne pas le reproduire !
On observe une diminution de cette onde erreur dans la plupart des troubles de l’usage de substances (cocaïne, nicotine…), ainsi que pour certains traits de personnalité fréquemment associés aux addictions comme l’impulsivité et la désinhibition.
Cela pourrait expliquer le maintien de ces comportements malgré leurs conséquences négatives : les neurones percevant moins « l’erreur » du comportement, qui serait reproduit.
L’hypothèse serait alors qu’un défaut dans le traitement de l’erreur existerait dans ces troubles, et que l’onde ERN pourrait en être un biomarqueur.
Pourtant, d’autres études montrent au contraire une onde augmentée dans la dépendance à l’alcool. Cette différence pourrait être expliquée par un manque de prise en compte dans les études de comorbidités anxieuses fréquemment associées à ce trouble (anxiété sociale, trouble anxieux généralisé, trouble obsessionnel compulsif) dans lesquelles l’ERN est augmentée.
Dans cette étude, 244 volontaires américains ont été recrutés puis divisés en cinq groupes : avec alcoolo-dépendance actuelle, avec alcoolo-dépendance en rémission, à risque d’alcoolo-dépendance, sans alcoolo-dépendance mais avec troubles psychiatriques (dépression, anxiété), sans aucun trouble.
Les participants ont répété une tache précise le plus vite possible pendant qu’un EEG était réalisé pour chacun d’eux.
Prenant en compte les comorbidités anxieuses, les résultats montrent des ondes ERN des personnes présentant un trouble de l’usage de l’alcool actuel significativement diminuées par rapport à celles de tous les autres groupes.
Ainsi, comme les autres troubles de l’usage de substance, les personnes souffrant de dépendance à l’alcool auraient des défauts dans le traitement de l’erreur, ce qui serait visible sur un tracé EEG.
Les chercheurs s’interrogent sur la signification précise à donner à cette onde ERN diminuée au moment de la dépendance à l’alcool : conséquence de l’effet délétère de l’alcool sur les neurones ou bien signe de plus grand risque de persistance du trouble ? On peut également se demander quelle pourrait être la place du dépistage de cette onde chez la population concernée en pratique clinique.
Julia de Ternay (interne de psychiatrie à Lyon)
& Benjamin Rolland (SUAL, Lyon)