
Quand nous le rencontrons, Nicolas (prénom d’emprunt) porte un jogging, une casquette noire, et dans ses mains, son téléphone qui ne le quitte jamais. Frénétiquement, il l’allume en permanence pour vérifier les notifications. Le jeune homme souhaite garder son anonymat car sa famille n’est pas au courant de son addiction.
Le jeune homme a commencé les paris sportifs à l’âge de 15 ans : “J’allais au bureau de tabac quand j’étais au collège. C’était des petites mises, c’était surtout pour le plaisir et gagner de l’argent.”
En France, la vente des jeux d’argent et de hasard aux mineurs n’est pas autorisée. Le jour de ses 18 ans, il s’inscrit sur les sites en ligne : “En plus, il y avait 100 ou 150 euros offerts. J’en ai profité. Là, je me suis dit : je vais pouvoir me remplir les poches. J’allais vraiment pouvoir parier parce que le bureau de tabac, il ferme à 20 heures. Donc on ne peut pas parier sur les matchs de nuit”, explique Nicolas.
« Pour me rattraper, je mets 200 euros pour me refaire »
À ce moment-là, il a quitté ses études et travaille pour subvenir à ses besoins. Très vite, il commence à parier quotidiennement sur le football, un sport qu’il pense maîtriser : “Je mise 50 euros et je gagne 100 euros. Je suis content alors je remets les 100 euros, mais je perds. Donc pour me rattraper, je mets 200 euros pour me refaire. Je les perds et je mise plus gros. Sauf qu’en une soirée, ça franchit vite les quatre chiffres.”
« Quand on perd, le cerveau ne réfléchit plus comme d’habitude. Il va vouloir se rattraper. Tous les matchs sont une occasion de se refaire. » ajoute-t-il.
Un engrenage qui va le conduire à prendre toujours plus de risques : “Un jour, j’ai parié 1000 euros sur un match de basket, j’étais confiant. La rencontre était à 5 heures du matin. Il y avait de la fatigue et je travaillais le lendemain. Sauf qu’au final, ça ne s’est pas passé comme prévu”, souffle le jeune homme, conscient d’avoir franchi une limite ce jour-là. “Après je me suis dit : « il faut que je les rattrape, je ne peux pas partir comme ça, je dois me refaire. Et ainsi de suite…”
60 000 joueurs en France se sont fait interdire de jeu
Face à cette addiction, Nicolas sait qu’il doit se faire interdire pour s’en sortir. En début d’année, il envoie un mail pour demander une auto-exclusion d’un an : “Je suis banni jusqu’au 1 janvier 2026. Je ne peux plus me connecter et si je décide de recréer un compte avec ma pièce d’identité, ils vont directement voir que je suis exclu”, explique le jeune homme qui reconnaît avoir gardé les applications installées sur son téléphone.
« Je suis honnête, je sais très bien que malheureusement tant que je ne suis pas exclu à vie je pourrais toujours parier« . ajoute-t-il.
En 2024, comme Nicolas, 60 000 joueurs en France se sont fait interdire volontairement l’accès aux jeux. Conscient que le combat risque d’être difficile, il a aussi contacté une association qui lutte contre les addictions. Nous avons pu assister à son premier rendez-vous avec une éducatrice spécialisée.
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