Le vin, appellation d’origine très protégée par Emmanuel Macron et le gouvernement

Le ministre de l’Agriculture, Didier Guillaume, exclut toute augmentation des taxes sur le vin. Pour les médecins, l’alcool, « une drogue légale », doit pourtant participer au fonds de lutte contre les addictions, au même titre que le tabac. Mais à l’Elysée et au Parlement, les intérêts de la filière viticole sont bien gardés.

Alcool

Le vin, appellation d’origine très protégée par Emmanuel Macron et le gouvernement. La filière viticole n’a en effet rien à craindre de l’exécutif. On l’avait déjà vu début 2018, quand la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, médecin de profession, avait osé dire que le vin est « un alcool comme un autre ». Pour avoir exprimé une évidence sur le plan scientifique et de la santé, elle avait été vite recadrée par le premier ministre et le chef de l’Etat (voir notre article). L’arrivée au ministère de l’Agriculture de Didier Guillaume ne va manifestement pas modifier la ligne du gouvernement. Interrogé ce mardi 23 octobre sur BFMTV sur une hausse des taxes sur le vin, l’ancien sénateur de la Drôme en a clairement écarté l’idée : « La santé, ce n’est pas plus de taxes ». « Ce n’est pas uniquement en buvant du vin que les gens meurent ou ont des accidents de la route dans les sorties de boîte de nuit » dit le ministre, qui défend plutôt la « prévention ».

L’alcool responsable de 49 000 morts par an en France

Des propos qui arrivent deux semaines après la publication d’une lettre ouverte, adressée par plusieurs médecins à Agnès Buzyn. Car sur le terrain de l’alcool, la bataille est aussi médiatique. « Madame la Ministre, protégez les Français des dangers de l’alcool ! » écrivent les médecins, qui regrettent que « l’alcool (soit) le grand absent du financement du « Fonds de lutte contre les addictions liées aux substances psychoactives » ». Autrement dit les drogues. Ils rappellent que l’alcool cause 49 000 morts chaque année en France. C’est la deuxième cause de cancers et la première cause de cancers du sein, ou encore la première cause de mortalité chez les 15-30 ans. Le coût social de l’alcool est estimé à 120 milliards par an. Voilà pour les chiffres.

Ces médecins ont face à eux l’Elysée, dont la conseillère agriculture, Audrey Bourolleau, est l’ancienne déléguée générale de Vin et société, le lobby chargé de défendre les intérêts de la filière viticole. « Une lobbyiste installée à l’Elysée, c’est sans précédent » rage Gérard Dubois, professeur de santé publique, membre de l’Académie de médecine et l’un des cosignataires de la lettre. Mais le vin dispose aussi de beaucoup de relais au Parlement. L’Assemblée, comme le Sénat, disposent de leur groupe d’étude sur le vin, composés d’élus des régions viticoles. Et la défense du vin n’a pas de couleur politique.

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Pour l’addictologue Michel Reynaud, qui a aussi signé la lettre, « les mesures efficaces sont l’augmentation du prix minimum de l’alcool. En termes d’unité d’alcool – 10 g –  c’est 25 centimes d’euros pour le vin. Il faudra atteindre 75 centimes, ce qui ferait une bouteille au minimum à 3 euros, au lieu de 1 euro ». Michel Reynaud souligne que « le modèle économique du vin et des alcools est basé sur les consommations excessives et les dépendants. 80 % de l’alcool vendu est acheté par 20 % des consommateurs. Et 8 % des consommateurs achètent 50 % de l’alcool vendu ».

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