Lutte contre l'alcoolisme : le monde de la santé s'indigne de la contribution des alcooliers

« Des mesurettes », cingle la Société française d'alcoologie. « Des vœux pieux et aucune mesure efficace », dénonce la Fédération française d'addictologie (FFA). « Des propositions cosmétiques pour un fléau sanitaire », s'inquiète la Ligue contre le cancer 

Alcool

Les addictologues protestent d’une seule voix contre le « plan prévention » présenté le 27 juin dernier à l’Élysée par la filière des boissons alcoolisées. Brasseurs de France, la Fédération française des spiritueux, la Fédération française des vins d’apéritifs, Vin & Société – dont l’ancienne déléguée générale Audrey Bourolleau est aujourd’hui la conseillère Agriculture d’Emmanuel Macron – et Avec Modération ! ont proposé de financer à hauteur de 4,8 millions d’euros sur quatre ans, trente mesures censées lutter contre les « situations à risques », et encourager « la consommation responsable ».

Pour lutter contre l’alcoolisation fœtale, le pictogramme représentant une femme enceinte dans un rond rouge barré devrait doubler (de 0,3 ou 0,4 cm à 0,8 cm) en 2019 ; contre le binge-drinking chez les jeunes, les lobbies proposent de former les professionnels de la vente, notamment dans les supermarchés, à mieux appliquer l’interdiction de la vente aux mineurs. Ils envisagent aussi de distribuer des « wine-bags » dans les restaurants pour ne pas forcer les clients à finir leur bouteille.

Des mesures en deçà des enjeux de santé publique 

« Des mesurettes », cingle la Société française d’alcoologie. « Des vœux pieux et aucune mesure efficace », dénonce la Fédération française d’addictologie (FFA). « Des propositions cosmétiques pour un fléau sanitaire », s’inquiète la Ligue contre le cancer

Addictaide et le Pr Michel Reynaud démontent l’argument de la consommation responsable. « Cela revient à se défausser sur le « consommateur responsable » de leur part de responsabilité », lit-on. Et d’épingler les multiples stratégies de consommation des alcooliers et leurs 600 millions d’euros de dépenses annuelles pour la publicité et le marketing. Soit 500 fois le montant qu’ils entendent placer dans la prévention.

Le président d’Actions addictions observe que les industriels tirent la majorité de leurs bénéfices des consommations excessives, de la dépendance, et des alcools bas de gamme, non des grands crus. Les deux tiers des consommateurs modérés ne boivent que 10 % de l’alcool vendu ; alors que les 25 % de buveurs à risque sont à l’origine de 40 % des ventes d’alcool, et les 8 % d’addicts, de la moitié. Le top 10 des vins vendus en grande surface est monopolisé par les bouteilles à 2 euros et les vins aromatisés.