ALCOOL / Une famille en enfer

Un enfer. C’est le mot qui revient le plus souvent dans la bouche de ceux qui vivent avec un proche alcoolique. « L’alcoolopathie est, aussi, une “familiopathie”, explique Philippe Batel, psychiatre addictologue.

Alcool

Un enfer. C’est le mot qui revient le plus souvent dans la bouche de ceux qui vivent avec un proche alcoolique. « L’alcoolopathie est, aussi, une “familiopathie”, explique Philippe Batel, psychiatre addictologue. Ses ravages sont physiques, mais aussi psychiques et relationnels. » Inéluctablement, l’alcool fait passer les collègues, les amis, mais surtout la famille, par un chemin de croix aux étapes bien connues.

Tous dépendants

Première phase, la bienveillance. On découvre qu’il – ou elle – a un problème ; on essaie de comprendre, d’aider. On minimise. Personne ne veut voir que le malade est malade, son comportement commence à produire des blessures. Imperceptiblement, l’entourage passe de la bienveillance au rejet. C’est la deuxième phase : l’alcool est désigné comme « le » problème. Il faut que les choses changent. Arrêter de boire. Se faire soigner. Contrôler ce qui n’est pas contrôlable. C’est la période de la course aux bouteilles cachées, des enquêtes sans fin, des hurlements pour faire avouer. Et, finalement, de ce que l’on appelle souvent la « codépendance » : l’entourage se met à souffrir des symptômes du malade. Comme lui, il cache « le problème » aux gens de l’extérieur. Comme lui, il se sent coupable de ne pas trouver de solution. Comme lui, il est gagné par la compulsion : le contrôle à tout prix, compter, mesurer, maîtriser l’immaîtrisable…

Et puis, tout le monde finit par comprendre qu’il « ne changera jamais ». C’est la troisième phase, celle de la guerre ouverte, du mépris. L’entourage devient bourreau, et le malade victime de cette rancoeur qu’il a lui-même provoquée. Plus on avance, plus les relations deviennent violentes et perverses. Les proches sont gagnés par le sentiment d’impuissance du malade. Inconsciemment, tout est organisé pour que rien ne puisse changer. La quatrième phase, de stabilisation, arrive quand l’abstinence dure : chacun doit trouver un nouvel équilibre dans une vie sans alcool. L’ancien malade doit reconquérir une identité de parent, d’amant, de collègue…, l’entourage, le reconnaître et s’adapter à cette nouvelle personne.

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