Quels sont les liens entre l’alexythymie, l’intéroception et la consommation d’alcool ?

L’alexithymie est fréquente chez les sujets souffrant d’addiction et de trouble de l’usage d’alcool (TUAL) en particulier. Il s’agit d’une anomalie du vécu émotionnel caractérisé par une difficulté à percevoir, à identifier et à exprimer les émotions

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L’alexithymie est fréquente chez les sujets souffrant d’addiction et de trouble de l’usage d’alcool (TUAL) en particulier. Il s’agit d’une anomalie du vécu émotionnel caractérisé par une difficulté à percevoir, à identifier et à exprimer les émotions. Ces difficultés sont impliquées dans le développement et le maintien des addictions. Une théorie récente propose que l’alexithymie serait secondaire à une défaillance de l’intéroception, c’est à dire la sensibilité aux stimuli corporels internes, dont les états d’excitation physiologiques. L’objectif de cette étude était d’évaluer le rôle respectif de l’alexithymie et des troubles de l’intéroception dans l’expression de comportements de binge drinking.

600 sujets ont complété un questionnaire d’alexithymie (Toronto Alexithymia Scale), un questionnaire de perception corporelle (Body Perception Questionnaire), et un questionnaire sur les usages de consommation d’alcool (Alcohol Use Questionnaire). Des analyses de régression et de bootstrapping (méthode d’inférence statistique) ont été menées pour vérifier si l’alexithymie jouait un rôle de médiateur entre l’intéroception et le niveau de consommation d’alcool.

L’alexithymie était corrélée positivement avec la sensibilité aux sensations corporelles et avec les niveaux de consommation d’alcool. L’analyse de médiation a révélé que l’alexithymie, et en particulier la difficulté à identifier ses sentiments, jouait le rôle de médiateur entre la sensibilité aux sensations corporelles et la consommation d’alcool. De la même façon, l’aspect prédictif des niveaux de sensibilité aux sensations corporelles n’était plus significatif lorsque l’on prenait l’alexithymie en considération dans l’analyse statistique.

Ces résultats semblent indiquer que l’alexithymie est associée à une hypersensibilité subjective aux sensations corporelles. Le modèle initial apparaît validé par les résultats qui placent l’alexithymie comme la résultante d’une altération du traitement des sensations corporelles. L’alexithymie serait elle-même responsable de la mise en place de stratégies d’adaptation inadaptées, dont la consommation d’alcool. Les auteurs proposent que l’alexithymie et l’interoception soient étudiées comme des cibles thérapeutiques potentielles.

 

 

 

Par Nicolas Cabé

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