Sevrage d’alcool : programme court ou programme long ?

Alors que l’utilisation de benzodiazépines lors du sevrage d’alcool fait l’objet d’un consensus large, les modalités pratiques de leur utilisation restent encore à définir. Une des principales questions à élucider est la durée optimale d’un tel traitement de sevrage, et son impact éventuel sur le risque de rechute.

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Alors que l’utilisation de benzodiazépines lors du sevrage d’alcool fait l’objet d’un consensus large, les modalités pratiques de leur utilisation restent encore à définir. Une des principales questions à élucider est la durée optimale d’un tel traitement de sevrage, et son impact éventuel sur le risque de rechute. Les benzodiazépines sont utilisées afin de prévenir et de traiter les complications du sevrage en restaurant la balance GABA/Glutamate. La plupart des recommandations actuelles recommandent de ne pas dépasser 15 jours de prescription devant le risque de dépendance et les risques liés à la co-consommation d’alcool et de benzodiazépines en cas de rechute. Toutefois, l’effet d’une prescription plus prolongée n’a jamais été vraiment évaluée alors que ces molécules pourraient jouer un rôle de « substitution » transitoire, et qu’elles sont très efficaces à court et moyen terme sur des symptômes comme le craving et l’anxiété, liés à l’hyperglutamatergie, qui sont très largement impliqués dans le risque de rechute. C’est notamment le cas dans le mois qui suit le sevrage en tant que tel, période où surviennent plus de la moitié des rechutes. Les auteurs proposent donc un protocole de sevrage plus prolongé, sur 30 jours, à base de Diazépam, benzodiazépine à pic d’action rapide (soulagement rapide des symptômes), mais longue demi-vie (limite le risque de sevrage et de rebond).

Deux protocoles (prescription de diazépam à dose dégressive 10 jours ou 30 jours) ont été évalués en essai ouvert, randomisé et contrôlé. 26 patients ont été inclus, 10 dans le groupe 10 jours (10J) et 12 dans le groupe 30 jours (30J). Le taux de rechute était évalué à 1, 2 et 3 mois (interrogatoire, alcootest et CDT).

Il n’y avait pas de différence significative entre les deux groupes en termes de rechute à 1 mois et 3 mois (ie consommation rapportée d’au moins 10g d’alcool à au moins 1 occasion ou alcotest positif lors d’une visite de suivi, ou CDT positive). Toutefois les patients 30J expérimentaient moins de consommations importantes ponctuelles, de consommation régulière ou de consommation régulière importante, à 3 mois que les patients 10J. Ces données étaient corroborées par les niveaux de CDT. Les patients 30J présentaient une diminution plus importante du craving et de l’anxiété entre la fin du sevrage et la consultation de suivi à 1 mois, ainsi que des niveaux significativement plus faibles d’intensité de ces symptômes tout au long du suivi par rapport aux patients J10.

Ces résultats semblent confirmer que comme pour d’autres substances (tabac, opioïdes), les médicaments de contrôle du sevrage pourraient jouer un rôle dans la prévention de la rechute et la réduction du craving. Les données de sécurité étaient rassurantes dans le cadre de cette étude puisqu’il n’y avait pas de différence de survenue d’effets indésirable entre les deux groupes. Un essai contrôlé et randomisé en aveugle serait nécessaire pour le confirmer

Par Nicolas Cabé

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