Cinéma / “Les mauvaises herbes“ de Louis Bélanger

affiche

 

Sur les écrans de cinéma en France depuis le 05 avril 2017, “Les mauvaises herbes“ nous embarque dans le grand nord québécois pour suivre l’avancée de la culture de marijuana de Simon Bouleriche, solitaire bourru d’une soixantaine d’années qui, pour offrir une forêt d’épineux à son fils dont il n’a plus de nouvelle depuis dix-huit ans suite à des rapports “compliqués“, décide de faire pousser dans sa grange un nombre de pieds de cannabis suffisants pour que ça lui rapporte trois cent milles dollars. L’homme est cardiaque et veut, avant de casser sa pipe, léguer une terre d’avenir à son fils.

La culture cannabique étant à l’heure actuelle encore illégale au Canada, même si un projet de loi de légalisation contrôlée a été déposé le 13 avril 2017 à l’initiative du nouveau premier ministre Justin Trudeau, la propriété privée de Simon est bien gardée, et le vieil homme a bien l’intention de garder le secret jusqu’à mener à bien sa récolte et ainsi la vendre comme convenu à des bikers, grossistes du coin.

La première personne, et malheureusement pas la dernière, à avoir le droit de rentrer dans la grange bien chauffée et bien éclairée de l’ours mal léché, est un acteur de théâtre, Jacques Sauvageau. Le comédien est accro aux jeux d’argent, et pour échapper en pleine représentation théâtrale à son principal créancier, à savoir Monsieur Patenaude, caïd en costard de Montréal, fuit loin de la ville, suffisamment loin pour se retrouver perdu en plein hiver, en pleine campagne, à des températures plus que négatives.

Simon Bouleriche le recueille dans sa maison et lui propose un deal. Il le cache, ne le dénonce pas à son créancier qui rôde dans les parages, et en échange celui-ci doit lui filer un gros coup de main pour faire avancer sa plantation illégale. Le travail est rémunéré, mais la rémunération servira à rembourser les dettes de jeu et non pas à les gonfler. Le comédien ne peut qu’accepter le deal car Simon ne lui ne laisse pas le choix. Une amitié et une solidarité finissent, malgré la pseudo détention, par naître entre les deux hommes qui ne vont pas rester seuls longtemps.

Une jeune femme, Francesca, va s’inviter dans la partie de cache-cache. Cette releveuse de compteur d’eau va découvrir le pot aux roses et sera à son tour séquestrée par le maître des lieux pour qu’il soit assuré qu’elle ne dira rien de l’activité illégale qui demande de la tranquillité et de la bienveillance bien entendu. Francesca participe à son tour au bon déroulement de la récolte et sera d’un grand secours quand Monsieur Patenaude pointera le bout de son nez…

Ici, l’intérêt économique d’une plantation de cannabis indoor de taille plus que correcte, se mesure à la hauteur du projet d’avenir ambitieux d’un homme qui vit simplement, et ne cherche pas à remplir vénalement son portemonnaies, mais simplement à acquérir une terre qu’il peut léguer à son fils perdu de vue depuis bien longtemps. L’empathie que Jacques et Francesca finissent par ressentir envers Simon est tellement communicative qu’elle passe la rampe et que les spectateurs n’ont qu’une envie, c’est que cette culture aille à son terme et que Simon récolte le fruit de son labeur.

Aucun des personnages ne consomme. On n’aura donc pas droit à la scène un peu trop vue et revue de consommateurs hilares qui s’essaient au cannabis pour la première fois. On s’éloigne ici des tentatives peu réalistes de films de deal de cannabis, en “cités“ ou ailleurs, où un ou une néophyte est confronté à un univers hostile où faire sa place relève d’un parcours périlleux où se croisent des personnages plus ou moins caricaturaux. La comédie cannabique prend parfois le risque de surfer sur des représentations erronées. Ce n’est pas le cas ici. De plus, à aucun moment, bien heureusement, la culture de cannabis est moralisée ou diabolisée. Le jeu d’argent l’est presque plus.

Il s’agit plutôt d’une culture de réconciliation avec le passé et l’avenir des personnages…

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