Ce récit à la première personne, publié aux Editions Notabilia, donne à la parole pendant une semaine à une mère d’un adolescent de dix sept ans. Son mari est parti en mission pour son travail. Le récit déroule sur l’ensemble des jours de la semaine, comme autant d’occasions d’en savoir un peu plus sur ce qui se vit pour cette femme, on le comprend très vite, alcoolo-dépendante, même si le déni traverse ce roman de bout en bout. La narratrice se débat dans son quotidien avec sa consommation chronique d’alcool mais surtout avec le manque qui, entre deux rasades, la pousse dans ses retranchements et l’incite par exemple à solliciter, un peu trop pressement visiblement, une voisine qui finit par arriver au bout de tous les mensonges ou faux prétextes pour quémander un véhicule et aller alors refaire des réserves d’alcool au supermarché du coin. On comprend que notre narratrice, journaliste, rédactrice, n’a plus son permis et qu’elle dépend désormais d’un mari qui lui a confisqué ses clés de voiture ou d’une voisine conciliante, mais qui a ses limites.
Les journées se passent entre réveil difficile, quête d’alcool dissimulé dans de simples bouteilles de lait en plastique qu’il faut régulièrement recharger, séjour bref dans la supérette du coin, assoupissements réguliers, discussions tendues avec un fils qui renverse les rôles et questionne sa mère sur ses allées et venues sans que l’on sache si c’est de l’inquiétude ou de la surveillance (sûrement un peu des deux), un rédacteur en chef qui réclame un article qui ne sera jamais écrit ou alors bien maladroitement et qui finit par réclamer un break dans la collaboration de la rédactrice avec le journal… Le huis clos est presque total. La journaliste est seule et coincée dans une demeure familiale qu’elle peut difficilement quitter car perdue au milieu de nulle part. Peu viennent à elle. Elle a, en quelque sorte, fait le vide autour d’elle. Même son fils préfère déserter le plus possible la maison. Cette mère de famille en est arrivée à un point où la confiance qu’on lui accorde part en décrépitude car trop souvent trahie. Les mensonges, la mauvaise fois, les bonnes ou mauvaises excuses ont fait leur temps. Il est l’heure de faire face. Mais même si elle veut bien reconnaître qu’elle a besoin d’aide, elle semble bien seule. Elle réclame de la clémence, de l’indulgence, et surtout de l’attention, de la tendresse, et de l’amour… Alors le déni sera peut-être moins encombrant, car ce déni, conscient ou inconscient, repose en partie sur une culpabilité pesante qui peut être alimentée par la personne “alcoolique“ elle-même, mais aussi par le regard, bien ou malveillant, compatissant ou non, de son entourage.
Car ici c’est bien ce déni permanent qui semble fatiguer cet entourage qui décide alors de poser des ultimatums, du moins le mari qui, à son retour de mission, propose à sa femme soit l’internement hospitalier, soit la mise sous tutelle. Drôle de choix à faire pour une femme qui semble à la merci des éléments qui se déchainent autour d’elle, éléments qui entretiennent une parano déjà bien développée.
Difficile de dire comment tout cela se terminera. On laisse l’histoire en suspend… Mais pendant ces quelques cent soixante pages que compte ce récit, on aura au moins été témoin d’une partie des émotions et sentiments qui jalonnent le parcours d‘une personne alcoolo-dépendante, avec peut-être l’envie de l’accompagner sur un temps de vie plus long…