Ce mini documentaire d’une vingtaine de minutes, diffusé sur Netflix dans une série intitulée “Le cerveau en bref“, nous raconte comment des psychédéliques de synthèse comme le LSD ou la psilocybine sont apparus dans les années 50-60 comme outils d’expérimentation d’une modification de conscience à usage médical, mais il nous explique aussi comment ils ont été mis au ban de la médecine et de la société au début des années 70, pour réapparaître enfin il y a quelques années dans de nouveaux protocoles expérimentaux…
En ce qui concerne le LSD, tout commence en 1943 à Bâle, en Suisse, où un chimiste réussit à synthétiser cette substance qui ne fera parler d’elle que quelques années plus tard. Ce désormais fameux chimiste, Albert Hofmann, en fait l’expérience lui-même et consigne ses “trip reports“ dans des cahiers qui parlent de vertiges, d’anxiété, de distorsions visuelles, de symptômes de paralysie, et d’envie de rire… D’après le documentaire, Albert Hofmann, lors de sa première expérience, aurait pris le double de ce qui correspondrait de nos jours à une dose standard (mais peut-on réellement parler de dose standard)… La molécule de LSD, comme d’autres psychédéliques que sont par exemple la mescaline (que l’on trouve par exemple dans le cactus peyotl), la psilocybine (que l’on trouve dans certains champignons hallucinogènes) ou la DMT (que l’on trouve dans l’ayahuasca, mixture à base de liane) fonctionne à l’égal de ses semblables. Elle se fixe sur certains récepteurs neuronaux et bouscule les perceptions, plus ou moins en profondeur en fonction de la dose de produit et de l’usager. De plus l’interconnexion entre certains neurones semble exacerbée…
Une phase d’expérimentation fut lancée par Albert Hofmann, à la suite de ses essais personnels, auprès de ses collègues, mais il faudra attendre les années 60, pour que de premières expériences soient soutenues officiellement par le gouvernement et soient réalisées dans une institution hospitalière pour tenter de soigner des troubles mentaux. Les premiers résultats furent concluants, et une grande vague d’essais fut alors lancée sur l’ensemble du territoire américain… Mais la contre-culture des sixties s’étant emparée des produits, les “trip cessions“ de LSD, de psilocybes ou autres hallucinogènes, prolifèrent et sont encouragées, entre autres, par un professeur d’Harvard, Timothy Leary, qui fit longtemps parler de lui avant d’être destitué de ses fonctions… Le revers de la médaille fut une diabolisation dans la conscience collective de ces expériences psychédéliques car elles étaient tout simplement associées à une culture Beat puis Hippie révolutionnaire qui n’était pas pour plaire au gouvernement américain. Il mit alors en place une législation prohibitive qui lança la fameuse “guerre à la drogue“ initiée par le Président Nixon au tout début des années 70… Le mouvement prohibitif fut mondial, et toutes les expériences médicales alors abandonnées. Les psychédéliques passèrent de l’image de médicaments pertinents à celle de toxiques à fuir à tout prix. Les risques furent particulièrement exagérés…
Il faudra attendre une trentaine d’années pour que de nouvelles expériences soient légalement approuvées et commencent à voir le jour. Les résultats de beaucoup d’études récentes semblent concluants et montrent que les psychédéliques permettent de modifier des comportements “déviants“ enracinés depuis des années. Certains patients ont réussi à vaincre ainsi une anxiété exacerbée par la peur de mourir par exemple suite à un diagnostic de cancer. D’autres ont considérablement minoré leur envie de fumer ou de boire de l’alcool. D’autres enfin ont soigné leur dépression chronique… Il a été observé que, bien entendu, l’intentionnalité de l’expérience est cruciale pour la maximiser, que le contexte, l’environnement, l’état d’esprit, l’humeur et les attentes ont aussi leur importance. A l’inverse, de mauvaises conditions et circonstances d’usage peuvent augmenter les risques de “bad trips“, d’où l’importance d’un accompagnement adéquat et adapté…
Il ne s’agit pas ici de faire une promotion aveugle de ces psychédéliques, d’autant que les risques associés à leur consommation ne sont pas négligeables, mais encore une fois, il serait dommage de ne pas profiter des bénéfices potentiels de ces substances chez certains patients en poursuivant des expérimentations et études qui vont dans le bon sens, celui d’un pragmatisme médical loin de toute idéologie prohibitive malvenue…
Thibault de Vivies
(Image par Enrique Meseguer de Pixabay)