Monsieur le Directeur de l’Administration Pénitentiaire,
Reconnue comme un outil indispensable de Santé publique, la Loi française valide et inscrit largement la réduction des risques et des dommages dans le Décret n° 2005-347 du 14 avril 2005. Elle prévoit une liste non limitative des lieux où elle doit s’exercer.
Un travail d’ampleur sur tout le territoire national est mené en ce sens par des professionnels hospitaliers, associatifs, fortement impliqués. Il propose la mise en œuvre de projets de réduction des risques consensuels, basés sur des données probantes, et d’expérimentations méthodologiquement rigoureuses conformes aux données actuelles de la science, allant de la formation/sensibilisation de tous les professionnels en milieu carcéral à l’articulation entre le milieu carcéral et l’extérieur, en passant par la mise en place d’outils de réduction des risques.
La crise COVID-19 que nous traversons encore et qui mobilise les soignants et les acteurs de la prévention, y compris en milieu carcéral, impose aux personnes détenues un confinement dans le confinement, une promiscuité accrue, des difficultés majorées pour les extractions sanitaires, des sorties d’incarcération rapides ne permettant pas toujours l’organisation immédiate de la continuité des prises en charge. Les professionnels constatent des prises de risque comportementales supplémentaires, liées notamment aux conditions d’incarcération, au stress et à la diminution de « l’approvisionnement »
habituellement ubiquitaire en produits stupéfiants.
Dans ce contexte, où un rebond épidémique des hépatites B et C, ainsi que du VIH, ne peut être exclu au sein de la population pénale, l’application des gestes barrières visant à protéger de la COVID-19 doit s’associer à une vigilance accrue quant à la poursuite d’un accès constant et facilité aux mesures de réduction des risques et des dommages liés aux conduites addictives et aux comportements sexuels à risque. La réduction des risques et des dommages n’est pas une incitation à enfreindre la règle, elle est une démarche efficace de Santé publique. Elle prévient des infections sévères, des intoxications aiguës
potentiellement mortelles, aide au repérage des comorbidités et à l’accès aux dispositifs de réinsertion sociale ; elle est aussi une porte d’entrée vers les soins.
Monsieur le Directeur, les professionnels qualifiés du soin et de la prévention vous demandent solennellement de faire largement diffuser l’information aux personnes détenues concernant les mesures de réduction des risques et des dommages liés aux consommations de substances et aux comportements sexuels à risque.
Il est indispensable que la population pénale, au même titre que la population générale, puisse accéder à tous les outils de réduction des risques et des dommages dont la pertinence est scientifiquement prouvée et unanimement reconnue.
Restant à votre disposition pour toute information complémentaire et dans l’attente de votre retour, nous vous prions de recevoir, Monsieur le Directeur de l’Administration Pénitentiaire, nos respectueuses salutations.