“Un ange“ Un film de Koen Mortier

Ce film est une adaptation cinématographique d’un roman lui-même très librement inspiré de l’histoire de Franck Vandenbroucke, coureur cycliste retrouvé mort dans une chambre d’hôtel sénégalaise en octobre 2009. Seul de l’alcool et des médicaments ont été retrouvés dans sa chambre, mais des traces d’injection ont été relevées sur ses bras. Le cycliste était accompagné la nuit précédente par une prostituée sénégalaise. Même si la thèse de l’overdose létale reste la plus plausible, le mythe persiste car il accompagne l’image sulfureuse que trimbalait un coureur déjà poursuivi pour des affaires de dopage… Le film raconte l’histoire d’amour éphémère de Thierry et Fae… Suite à une chute grave et à plusieurs mois d’entrainement intensif pour revenir au niveau, il décide de prendre quelques jours de repos loin de l’agitation et de la pression médiatique et sportive. A l’aéroport, il retrouve son frère qui est son fournisseur de cocaïne et autres produits dopants, produits que Thierry s’injecte en intraveineuse dès son arrivée à l’hôtel… Fae, jeune prostituée sénégalaise, fait la rencontre du coureur dans un bar restaurant. Quelque chose se passe entre eux au-delà du contexte de rencontres tarifées. Elle n’y connait rien en cyclisme, et prend le bonhomme pour ce qu’il est et non pas pour ce qu’il représente. Elle parait sincèrement sous son charme…

Un premier moment crucial de la soirée vient bousculer la bonne humeur et le bon état d’esprit du coureur cycliste : un coup de fil de son directeur sportif qui lui annonce qu’il est viré de l’équipe. Le sportif est très en colère. Fae est là pour lui changer les idées. Thierry se sent si bien avec elle qu’il lui fait une demande en mariage suffisamment précipitée pour que Fae, méfiante et expérimentée, lui propose simplement d’y réfléchir. On sent bien que Thierry est en quête de nouvelles satisfactions, voire de sensations fortes… En rentrant à son hôtel, un obstacle se dresse sur sa route, autre moment crucial : le réceptionniste ne peut pas accepter que la jeune femme l’accompagne dans la chambre car elle ne possède pas de carte sanitaire, carte attribuée aux prostituées pour justifier de contrôles réguliers. Fae ne peut donc pas passer la nuit avec lui dans cet hôtel-là. Thierry doit faire avec et son coup de sang n’y changera rien. Fortement contrarié, il décide d’aller passer un moment seul dans sa chambre pour s’injecter une dernière dose de remontant. Fae n’a aucune idée des consommations de ce compagnon d’une soirée. Après avoir repris ses esprits, Thierry rejoint sa “gazelle“ (nom donné aux prostituées). Mais quelque chose a changé. Une parano exacerbée et déstabilisante se manifeste ouvertement, et le comportement envers la jeune femme devient plus que déplacé et insultant. Arrivé dans la chambre de l’hôtel où Fae a l’habitude d’emmener ses clients, Thierry ne se sent pas bien physiquement et clame avoir été empoisonné. Il demande à la jeune femme démunie de le laisser tranquille, de l’abandonner là et de ne revenir que le lendemain matin… La suite, vous la connaissez…

Les tourments que traversent le jeune homme dans ce court moment de vie, rappellent la difficulté pour le coureur cycliste de renom de faire face parfois à la célébrité, avec ses bons côtés certes mais aussi ses mauvais côtés, c’est à dire le poids de l’attente d’un entourage professionnel et personnel tout aussi exigeant que des fans qui réclament eux aussi un retour sur investissements en quelque sorte… Thierry nous explique de son côté que s’il prend tous ces produits dopants, c’est pour ses supporters… Une chose est sûre, les exigences imposées aux sportifs de haut niveau pour maintenir la cadence et satisfaire les enjeux économiques doivent être observées de près. La lutte contre le dopage ne peut pas se focaliser sur des hommes et des femmes engagés depuis le plus jeune âge dans des métiers qui reposent sur le culte de la performance. Leur reconnaissance repose elle sur une obligation de résultat quels que soient les moyens engagés…

 

Ce texte est la version courte d’un article paru dans le numéro #02 de le revue DOPAMINE

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