Documentaire / “Cannabis sur ordonnance“ de Raphaël Hitier

Cannabis leaf

 

Ce documentaire diffusé sur ARTE propose une plongée pédagogique dans le domaine du cannabis médical en pleine effervescence depuis quelques années, même si ces vertus thérapeutiques sont connues depuis la nuit des temps. Le cannabis a eu sa place dans la pharmacopée de certaines médecines traditionnelles comme la médecine indienne, du moyen orient, de Grèce et même de France, avant que la prohibition à l’échelle mondiale se charge injustement de le bannir et de le diaboliser, au même titre que la cocaïne, l’opium et l’héroïne. Avant qu’il disparaisse du paysage médical, le cannabis était chiqué, but en infusion ou parfois fumé pour ses vertus apaisantes, mais aussi euphorisante bien entendu.

Le documentaire nous rappelle que le Colorado fut en 2001, avec la Californie, le tout premier état à légaliser le cannabis à usage thérapeutique mais aussi le premier à le légaliser à usage récréatif en 2012 (mise en application de la loi : 1er janvier 2014). Dans cet état, les dispensaires spécialisés sont légions, et accueillent entre autres des patients souffrant de troubles sévères dont la plante peut soulager les crises et douleurs chroniques. Ces patients sont parfois constitués en associations qui essaient de promouvoir à grand renfort d’études scientifiques sérieuses, les différents usages thérapeutiques de la plante. En 2016, plus de la moitié des états américains, et des dizaines de pays dans le monde avaient légalisé l’usage médical du cannabis.

Le documentaire fait bien la différence entre des spécialités de la plante aux vertus essentiellement psychoactives et d’autres aux vertus essentiellement, si ce n’est exclusivement, thérapeutiques.

Bien entendu, il ne s’agit pas de nier les dangers potentiels d’un produit dont les effets psychoactifs de certaines variétés peuvent avoir une incidence, notamment, sur la construction des adolescents. Mais attention à ne pas faire d’amalgame. Le Dr Amine Benyamina, addictologue à l’Hôpital Paul Brousse, dont les interventions éclairent le contenu du documentaire, nous demande de ne pas confondre cannabis à usage récréatif non contrôlé, vendu dans la rue, et cannabis à usage médical, objet de toutes les attentions et vérifications, et dont les variétés mises sur le marché ne sont, pour la plupart, pas ou peu psychoactives. Les cannabinoïdes de la plante sont plus d’une centaine, mais les deux molécules les plus concernées sont en l’occurrence le THC (Tétrahydrocannabinol) responsable des effets psychoactifs, et le CBD (cannabidiol) dont les vertus thérapeutiques sont mises en avant. Certaines variétés sont plus chargées en CBD ou THC que d’autres. C’est le Professeur israélien Raphaël Mechoulam qui étudia les principes actifs du cannabis et découvrit en 1964 les deux fameuses composantes du cannabis, les récepteurs neuronaux ciblés et le fonctionnement du système endocannabinoïde.

Qu’en est-il de la place du cannabis médical en France de nos jours ? Même si certains patients l’ont adopté et le consomme clandestinement, le pays n’a jamais été, et n’est toujours pas, un grand promoteur du cannabis thérapeutique. En 2014 fut tout de même mis sur le marché le Sativex©, à destination des malades atteints de sclérose en plaques. Ce médicament en spray n’est malheureusement toujours pas prescrit, pour des raisons de problématique de remboursement mais aussi de frilosité médicale.

Malgré les réticences de certains, dont le Professeur Jean Costentin de l’Académie de médecine, qui prend la parole dans le documentaire et poursuit sa croisade de diabolisation de la plante, gageons que le cannabis médical a de beaux jours devant lui…