L’essentiel en quelques chiffres

Depuis l’ouverture en 2010 d’une offre légale de jeu d’argent et de hasard en ligne, associée à des campagnes publicitaires massives de la part des opérateurs de jeu, le secteur des jeux d’argent et de hasard représente un pan de plus en plus important de l’économie française. Focus sur les chiffres issus de la dernière enquête de l’OFDT (Observatoire français des drogues et des conduites addictives).

Les joueurs français, en quelques chiffres

D’après l’enquête EROPP 2023 (l’Enquête sur les Représentation, Opinions et Perceptions sur les Psychotropes, où l’OFDT a interrogé 14 984 adultes : Spilka S., Le Nézet O., Janssen E., Philippon A., Eroukmanof V. (2024) La pratique des jeux d’argent et de hasard en France en 2023. Paris, OFDT, coll. Rapports, 30 p.), plus de la moitié des Français âgés de 18 à 75 ans, 51,6%, ont joué à un jeu d’argent et de hasard, soit près de 4,6 points de plus que la dernière enquête OFDT de 2019. Cette hausse concerne autant les hommes que les femmes et toutes les catégories d’âge. Les jeux de tirage (Loto®, Euromillion®…) sont toujours les plus populaires en France : plus d’un tiers de la population adulte, 34,2%, y a joué au moins une fois en 2023. Les jeux de grattage arrivent en 2^e position avec 30.9%. ] Les paris sportifs, quant à eux, sont loin derrière avec 6,7%, malgré une progression de 16% de leur Produit Brut des Jeux (PBJ) au cours du 1^er semestre 2024 d’après les chiffres de l’ANJ. Ils sont suivis des machines à sous, 6.6%. Enfin, les jeux de casino, les paris hippiques et le poker représentent moins de 5%. Plus de la moitié des joueurs au cours de l’année 2023, 52,2%, ont misé de l’argent uniquement sur un seul type de jeu. Autrement dit, 47,8% ont misé de l’argent sur au moins deux types de jeux distincts. Un joueur sur dix, 9,8%, a misé de l’argent sur trois types de jeu.

En 2023, 31,8% des joueurs ont utilisé internet pour jouer contre 16,1% en 2019. Cette utilisation d’internet est très importante chez les parieurs sportifs, 74,9% et les joueurs de poker, 65,3%.

Pratiques en population adolescente

Selon l’enquête ESCAPAD sur la pratique des jeux d’argent et de hasard chez les jeunes de 17 ans effectuée en 2022, 27,5% des jeunes âgés de 17 ans ont déclaré avoir joué à un jeu d’argent et de hasard au moins une fois dans l’année, et 4% au moins une fois par semaine. La part des joueurs de 17 ans susceptibles d’avoir une pratique de jeux à risque est estimée à 1,3%.

Un marché florissant

En 2023, le marché des jeux d’argent et de hasard atteint un chiffre d’affaires de près de 13.4 milliards d’euros, soit plus de 450 millions d’euros de plus qu’en 2022. La dépense par habitant majeur n’a cessé de croître ces quinze dernières années et s’élève en 2023 à 249 euros par an contre 169 euros en 2008.

Jeux d’argent en ligne : comparaison entre les femmes et les hommes

Des chercheuses françaises se sont intéressées aux différences entre les joueurs et les joueuses (Plus d’informations sur cette recherche : Saillard A, Grall-Bronnec M, Rousselet M, Thiabaud E, Leboucher J, Caillon J, Challet-Bouju G. Online Gambling in France: Comparison of Women and Men (chapter 17).In: Behavioural Addiction in Women: An International Female Perspective on Treatment and Research,sous la direction de F. Prever, G. Blycker et L. Brandt. Routledge, 2023). En France, comme dans d’autres pays, les jeux d’argent et de hasard en ligne se sont beaucoup développés au cours de la dernière décennie et la proportion de femmes joueuses n’a cessé d’augmenter. Plusieurs études scientifiques montrent des différences entre la pratique de jeu des hommes et des femmes, notamment leurs motivations à jouer et le type de jeu choisi. Ainsi, les femmes préfèrent jouer à des jeux de hasard pur (loteries, machines à sous, cartes à gratter), tandis que les hommes se tournent plus facilement vers des jeux d’adresse et de hasard (paris sportifs, paris hippiques, poker). Quant aux motivations à jouer, les femmes jouent plutôt pour échapper à des émotions négatives et pour éviter l’ennui, alors que les hommes cherchent l’excitation, la démonstration de compétences et des gains d’argent.

Les femmes déclarent également passer moins de temps sur les jeux en ligne que les hommes et dépenser globalement moins d’argent pour les jeux en ligne (deux fois moins que les hommes). Pourtant, elles signalent plus souvent des conséquences financières négatives liées au jeu. Ce paradoxe peut s’expliquer, d’une part, par un revenu mensuel significativement plus faible que celui des hommes dans l’échantillon interrogé, rendant les conséquences financières du jeu plus rapidement visibles pour les femmes. D’autre part, il pourrait être expliqué par la théorie des rôles de genres. Les femmes seraient ainsi incitées à agir en fonction de normes, de valeurs et d’attentes qui leurs seraient assignées par la société. Ce phénomène qui mêle socialisation et charge mentale induirait une sensibilité différente vis-à-vis du temps et de l’argent consacrés aux jeux. Les femmes opteraient pour des jeux qui mobilisent moins de temps et d’argent (comme c’est le cas pour les jeux de hasard pur), ce qui leur permettrait de garder le contrôle sur leur pratique de jeu afin de maintenir leur indépendance financière et gérer leur temps. Ainsi, leur rôle de genre ne permettrait pas au jeu de prendre une place prédominante dans leur vie quotidienne, ce qui les protègerait indirectement de dérives addictives. Ceci explique sans doute pourquoi les chiffres de prévalence des problèmes de jeu sont généralement plus bas chez les femmes que chez les hommes.