TDAH et Trouble d’Usage d’Alcool

Une synthèse de littérature et guidance clinique, parue dans la revue Neuro-Biobehavioral Reviews (NBR).

Alcool

Malgré une littérature de plus en plus abondante sur l’interconnexion complexe entre le Trouble Déficit Attentionnel / Hyperactivité (TDAH) et la consommation de substances, les revues s’intéressant plus spécifiquement à l’alcool sont peu abondantes, en partie avec une approche neurobiologique. C’est cet objectif qu’on poursuivi les auteurs de cette revue narrative, parue dans Neuro-Biobehavioral Reviews (NBR), journal très prestigieux à plus de 10 d’Impact Factor.

Le TDAH et le trouble de l’usage de l’alcool partagent des facteurs de risques développementaux, ainsi que des bases physiopathologiques communes : neuropsychologiques, génétiques et neurobiologiques, impliquant la neurotransmission glutamatergique et catécholaminergique (notamment la dopamine).  L’impulsivité associée à des troubles du système de récompense, qui sont des caractéristiques partagées par les deux troubles, rendent ainsi les patients TDAH vulnérables à la consommation d’alcool, qui présentent un risque de 43% d’en développer un trouble de l’usage. Réciproquement environ 20% des patients avec un trouble de l’usage de l’alcool présentent un TDAH. Mais ces chiffres demeurent actuellement largement sous-estimés.  

De plus, il est à noter que le trouble de l’usage de l’alcool est non seulement plus sévère, mais débute également à un âge plus précoce chez les patients TDAH que dans la population générale, et qu’il est plus souvent associé à la consommation d’autres substances.  De même que le TDAH et le trouble de l’usage de l’alcool constituent tous deux des facteurs de risques de dépression, d’état de stress post-traumatique, et de comportements à risque, l’association des deux majore celui de décès prématuré.  

Il apparaît ainsi nécessaire que des mesures de dépistage du TDAH, associées à des protocoles thérapeutiques, doivent être mis en œuvre dans le contexte de la prise en charge d’un trouble de l’usage de l’alcool. Pour ce faire, le questionnaire ASRS (Adult ADHD Self Report Scale) est utilisé en pratique pour le dépistage en routine, pouvant être complété par la CAARS-S-SR (Conners’ ADHD Adult Rating Scale) afin d’obtenir une meilleure spécificité. Le diagnostic de TDAH repose ensuite sur un diagnostic clinique, et l’utilisation d’entretiens semi dirigés, telles que la CAADID (Conners’ Adult ADHD Diagnostic Interview for DSM-IV) ou la DIVA (Diagnostic Interview for Adult ADHD), constituent des outils intéressants. 

Concernant la prise en charge : des traitements, stimulants à longue durée d’action ou bien non stimulants, peuvent être utilisés pour traiter les patients TDAH atteints d’un trouble de l’usage de l’alcool.  Les traitements stimulants, à l’instar du méthylphénidate, sont les plus couramment utilisés dans la prise en charge du TDAH, suivant les recommandations internationales en vigueur après avoir fait la preuve de leur efficacité et de leur sécurité. Au contraire de favoriser le développement de conduites addictives, les études montrent que ces traitements contribuent à les diminuer, et plus particulièrement lorsqu’ils sont initiés précocement et à dose efficace. En cas de risque de mésusage il serait préférable, selon certains auteurs, de choisir un traitement non psychostimulant telles que l’atomoxetine ou la guanfacine. Il est par ailleurs crucial de combiner le traitement pharmacologique à une prise en charge psychothérapeutique.  

Enfin, l’identification des individus à risques de développer un trouble de l’usage de l’alcool constitue quant à elle un facteur clé de prévention, et plus particulièrement ceux présentant un TDAH ou un Trouble Oppositionnel avec Provocation (en temps que première comorbidité du TDAH chez l’enfant). 

Résumé par Alexandre AUGE, interne en psychiatrie à Lyon

Relecture : Pr Benjamin ROLLAND

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