Traiter l’hépatite C peut-il avoir une conséquence sur le niveau d’usage d’alcool ? Oui selon une étude française publiée dans Addiction.

HEPAVIH est une importante cohorte française composée de sujets infectés à la fois par l’hépatite C et le VIH. Ce projet, financé par l’ANRS et coordonné par Patrizia Carrieri, chargée de recherche INSERM à Marseille, a mené à de nombreuses publications épidémiologiques de premier plan.

Alcool

HEPAVIH est une importante cohorte française composée de sujets infectés à la fois par l’hépatite C et le VIH. Ce projet, financé par l’ANRS et coordonné par Patrizia Carrieri, chargée de recherche INSERM à Marseille, a mené à de nombreuses publications épidémiologiques de premier plan.

Ici, les auteurs se sont intéressés à l’effet que pouvait avoir le traitement du virus de l’hépatite C (VHC) sur l’évolution longitudinale des consommations de substances, en particulier d’alcool. L’étude a porté sur 258 patients enrôlés à partir de 2006, et ayant tous commencé un traitement anti-VHC pendant le suivi. Le traitement était bien sûr celui de référence au moment du suivi, c.à.d. l’interféron pégylé.

Les auteurs ont retrouvé une baisse très nette des indicateurs d’usage d’alcool, en particulier une réduction moyenne de consommation de 10 verres-standard par mois, après le traitement par interféron, et ce quel que soit le résultat de celui-ci sur le plan virologique. Par contre, les sujets traités n’avaient pas réduit de manière significative leur usage de tabac et le taux d’usagers quotidiens de cannabis était resté inchangé.

L’interprétation causale de ces résultats est bien sûr complexe, mais les pistes de réflexions sont nombreuses. Dans les recommandations officielles de l’époque, les patients traités par interféron devaient s’abstenir de consommer de l’alcool avant que le traitement puisse être initié. En pratique, et cette étude en est l’illustration, beaucoup d’hépatologues initiaient le traitement chez des patients encore usagers d’alcool, mais pour lesquels ils estimaient probablement qu’un travail addictologique concomitant au traitement pouvait être envisagé.

Comme le rappellent les auteurs, le traitement antiviral se basait sur un principe d’injections répétées, nécessitant une rencontre régulière avec du personnel soignant, et ainsi une sensibilisation continue des patients face aux enjeux de santé les concernant, et très probablement une information répétée sur la nécessité de modérer leur usage d’alcool pour favoriser l’efficacité du traitement antirétroviral. Même si cette étude n’apporte pas d’élément explicatif clair sur les principaux résultats, c’est sans doute l’explication la plus vraisemblable pour expliquer pourquoi les patients réduisaient significativement leur usage d’alcool mais pas leur usage de tabac ni de cannabis.

Les résultats de cette étude sont importants. Ils appuient l’attitude pragmatique des cliniciens qui choisissaient de faire confiance aux patients, et qui démarraient le traitement antiviral en l’absence d’un arrêt des consommations d’alcool. Cette attitude pragmatique consiste à faire le pari que l’évolution du patient et la relation de confiance entre soignants et soignés sont étroitement intriqués, et qu’il n’est donc pas nécessaire d’attendre que les patients soient parfaits pour commencer à travailler avec eux et à les soigner. De manière plus générale encore, cette étude illustre de manière limpide que les sujets infectés par le VHC et/ou le VIH, notamment les usagers ou anciens usagers de drogues injectables, sont des individus qui peuvent montrer un haut niveau de responsabilité et d’implication dans les soins pour peu qu’on les informe correctement de ce que leur état de santé requière en matière de modification de comportements et d’usage de substances. Certains pourront dire qu’on le savait déjà. Oui mais malheureusement il est toujours nécessaire de le rappeler, et cette étude très rigoureuse est aussi utile à sa manière dans la lutte sans fin contre la stigmatisation.

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