Un niveau insuffisant d’activité physique est lié à un trouble d’usage d’alcool plus sévère

Une étude parue dans Nutrients

Alcool

En France, on recommande de pratiquer 30 minutes d’activité physique régulière d’intensité modérée (jardinage, montée des escaliers, ménage, bricolage) à élevée (vélo, ski, marche nordique) par jour, et ce au moins 5 jours par semaine, afin de rester en bonne santé. En effet, un niveau d’activité physique suffisant est bénéfique à bien des égards pour nous : amélioration du sommeil, du moral, diminution du risque de cancer, de maladie cardiovasculaire, amélioration des douleurs… Bref, on n’en finit plus de trouver des impacts positifs sur la santé humaine !

En addictologie aussi, les chercheurs s’intéressent de plus en plus à l’activité physique. Plusieurs études récentes ont inclus des programmes d’activité physique dans le parcours de soins de patients souffrant d’un trouble d’usage d’alcool (addiction à l’alcool) et ont montré qu’une augmentation du niveau d’activité physique entrainait une amélioration significative du trouble. Les patients rapportaient ainsi une diminution de la quantité d’alcool consommée, une diminution du craving (envie irrépressible de consommer), ainsi qu’une amélioration de leur qualité de vie. Il apparait donc important d’intégrer l’activité physique comme une des nouvelles dimensions thérapeutiques dans l’addiction à l’alcool.

Mais est-il vraiment intéressant de le faire pour tous les patients souffrant d’un trouble d’usage d’alcool ?

Notre équipe a voulu répondre à cette question, avec l’hypothèse qu’un niveau d’activité physique insuffisant est associé à un trouble d’usage d’alcool plus sévère et donc, qu’il serait peut-être plus pertinent de focaliser les interventions visant à augmenter le niveau d’activité physique lorsque l’addiction est plus sévère.

Nous avons inclus dans notre étude 382 patients suivis en addictologie pour un trouble d’usage d’alcool dont la sévérité était évaluée. Les participants ont répondu à plusieurs questionnaires, portant sur leur niveau d’activité physique les sept derniers jours, mais aussi sur d’autres paramètres tels que les autres consommations de substances (tabac, cocaïne, cannabis, opioïdes, stimulants) et des paramètres psychologiques (échelles de dépression, d’anxiété, d’impulsivité).

Les résultats montrent qu’un niveau d’activité physique insuffisant chez les patients est associé à une plus grande sévérité du trouble d’usage d’alcool, à un usage d’opioïdes plus fréquent, à une plus forte dépendance à la nicotine, à de plus forts niveaux d’impulsivité et d’anxiété, ainsi qu’à une qualité de vie et de sommeil détériorées par rapport aux patients ayant un niveau d’activité physique modéré à soutenu.

Il semblerait donc assez logique de proposer des programmes visant à augmenter le niveau d’activité physique en priorité chez les patients souffrant d’un trouble d’usage d’alcool sévère et ayant un niveau d’activité physique insuffisant.

Reste à savoir si l’on doit adapter ces programmes aux patients présentant d’autres vulnérabilités, par exemple pour les patients souffrant de troubles mentaux (les comorbidités psychiatriques étant plus souvent la règle que l’exception en addictologie).

Un autre point crucial qu’il faudra étudier dans le futur est la question du maintien à long terme de la motivation à maintenir une activité physique suffisante chez les patients ayant une addiction à l’alcool. En effet, si les bénéfices sur l’addiction sont visibles assez nettement à court terme, on peut supposer qu’ils perdurent aussi longtemps que le niveau d’activité physique est amélioré, mais qu’ils pourraient s’estomper en cas de retour à un niveau d’activité physique insuffisant.

Julia de Ternay, Docteur Junior en Psychiatrie-Addictologie

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