Cet ouvrage, publié par les Editions Odile Jacob, est sous-titré “Le combat des 5 médecins de la drogue“ comme les cinq doigts d’une main qui s’est saisie, avant beaucoup d’autres professionnels, d’une problématique toujours d’actualité, celle de la réduction des risques liés aux usages de drogues.
Ces cinq professionnels se sont croisés souvent, on travaillé, réfléchi et agi ensemble, ou du moins dans la même direction, dans un combat pour soulager la douleur des toxicomanes et surtout une stigmatisation inscrite dans la fameuse loi de 1970 qui faisait d’eux des délinquants dont il fallait compliquer le parcours d’usage, loi de 1970 toujours en vigueur aujourd’hui. La reconnaissance de l’usager comme citoyen à part entière, et non pas comme déviant, a encore du chemin à parcourir et c’est la raison pour laquelle le combat de ces cinq médecins se décline aussi au présent et au futur. « Les médecins qui signent cet ouvrage luttent contre cette énorme méprise, ce glissement de sens. Quelques mots, quelques pages suivent pour résumer une audace, une volonté qui nous tient depuis plus de trente ans et n’est pas apaisée : nous voulions calmer les douleurs épouvantables des toxicomanes en manque et nous souhaitons toujours que ces hommes et ces femmes reçoivent les soins que requièrent leur condition. Ils sont des victimes, comme toutes les victimes et les médecins se doivent d’être à leurs côtés. Réduire les risques : c’est pour cela que nous avons voulu nous porter vers eux. Comme dans l’humanitaire, il fallait croiser la médecine avec les droits de l’homme. »
Ce qui semble être une évidence aujourd’hui dans l’accueil, l’accompagnement et le soin, ne l’a pas toujours été, et reste fragile car encore en butte à des représentations erronées mais tenaces qui placent encore l’usager de drogues dépendant au banc de la société, surtout quand cette dernière se laisse aller à ses penchants hygiénistes et/ou moralistes. Certains plaisirs, de ceux qui invitent à la consommation de beaucoup de psychotropes, du moins au commencement de l’usage, seront toujours considérés comme déviants tant que la loi les condamnera. Une consommation problématique sera alors parfois malheureusement associée à une punition méritée dont la souffrance engendrée constituerait un mal nécessaire.
Cet ouvrage nous raconte en quelque sorte l’histoire de la réduction des risques par le prisme de cinq de ses principaux protagonistes, “gang“ de médecins précurseurs d’une démarche sanitaire et humaniste qui a permis, avec du temps et de la persévérance, d’influencer des politiques publiques souvent frileuses, et de faire ainsi avancer une cause et des actions partagées aujourd’hui par un panel très large de professionnels du secteur.
La narration est accompagnée d’échanges informels entre des médecins qui nous font vivre l’aventure du dedans avec le recul d’une expérience accumulée pendant toutes ses années au contact des principaux intéressés, à savoir les usagers. Entre souvenirs, critiques, regrets et fierté d’acteurs de terrain, on avance dans la lecture avec cette idée que le combat vers un pragmatisme affirmé du traitement de ces problématiques addictives, a encore de beaux jours devant lui tant que le mouvement international de dépénalisation et/ou de légalisation contrôlé amorcé n’aura pas atteint l’hexagone…