“My beautiful Boy“ - Un film de Felix Van Groeningen

Autres drogues

Ce film américain du réalisateur belge, en salle depuis le 06 février, est en de nombreux points semblable à celui de Peter Hedges, Ben is back, sorti en janvier en France. Cette fois-ci il s’agit du rapport entre un père David et son fils Nic dépendant à la méthamphétamine. Nic est consommateur de nombreuses drogues depuis l’adolescence, mais c’est visiblement la meth qui deviendra son produit de prédilection. Cette histoire est inspirée de celle de David et Nic Sheff, père et fils qui ont publié chacun de leur côté, en 2008 et 2009, leur récit respectif de cette période d’usage chronique et de tentatives successives de sevrage. Le film est positionné plutôt du côté du récit paternel.

David, journaliste reconnu à Rolling Stone, s’est lui-même, de son propre aveux, essayé à de multiples drogues pendant sa jeunesse, mais quand il apprend que son fils de 18 ans est entré lui dans une consommation problématique, il tombe des nues. Après un usage expérimental et récréatif, Nic est visiblement devenu dépendant… Dans la tête de David, les questions s’accumulent. Comment un jeune homme aussi brillant intellectuellement, aux portes des Universités qui lui ouvrent toutes les bras, a-t-il pu se laisser embarquer là-dedans ? Qui est responsable, le produit, l’enfant, les parents ? Qu’est devenue cette complicité entretenue pendant des années avec ce fils que David ne reconnaît plus ? Comment le sortir d’affaire ? Comment le sauver ? Quel est ce produit, la méthamphétamine, dont il a entendu parlé mais qu’il connaît peu finalement ?… David fera tout pour tenter d’avoir des réponses à toutes ces questions légitimes, alors qu’il doit accepter que ça lui échappe et qu’il ne peut avoir le contrôle sur tout. On sent bien qu’il se débat un peu seul avec tout ça car c’est lui qui a toujours été le plus proche de son fils, qu’il n’a rien vu venir de sa consommation, et qu’il ne veut évidemment pas perdre la partie.

Le journaliste est un père divorcé, remarié, qui a deux nouveaux enfants de cette deuxième union. Mais il a décidé de consacrer tous ses efforts à la réussite du sevrage de son fils Nic, sans trop y mêler sa nouvelle famille pour la protéger… Les cures d’abstinence se succèdent mais ne tiennent pas sur la durée. Nic sait que s’il revient encore et encore à une consommation sans contrôle c’est qu’il a besoin de remplir le vide qui l’habite et que ces produits lui font tout simplement du bien. Mais il ajoute que de connaître les raisons de cet usage n’y change rien. Il raconte que depuis sa première prise de méthamphétamine et l’euphorie extrême qu’il a ressentie à ce moment-là, il n’a jamais réussi à avoir des satisfactions aussi fortes dans sa vie de lycéen ou de jeune étudiant. Les temps de répit sans produit sont donc de courte durée, car le besoin de sensations fortes revient au galop sans qu’il réussisse à y échapper. Et puis, comme il le dit si bien, on oublie avec le temps les raisons pour lesquelles on avait arrêté, alors reprendre l’usage ne parait pas si inquiétant.

Bien entendu, pendant que le fils se débat avec ses arrêts puis reprises de consommation, dans une boucle qui semble sans fin, le père dépassé et démuni perd patience, découragé qu’il est par tous les espoirs déçus et par un addictologue qui lui annonce que son fils a moins de 10% de chance de s’en sortir. Comme David est très rationnel, ce chiffre l’assomme. Heureusement ce n’est pas une question de statistiques, loin de là. Ce père a du mal à accepter que les “rechutes“ successives de son fils font partie du processus de sevrage. L’abstinence totale ou la reprise du contrôle d’une consommation, quelque soit le produit, ne peut pas être un long fleuve tranquille, et le besoin d’accompagnement des parents peut être aussi essentiel que celui des enfants…

Ce texte est la version courte d’un article paru dans le numéro #02 de le revue DOPAMINE

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