Roman / “La ligne de fuite“ de Robert Stone

Autres drogues

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Ce roman, dont le titre original est “Dog soldiers“, réédité par les Editions de l’Olivier, avait fait l’objet d’une première traduction et publication en 1978 sous le titre “Les guerriers de l’enfer“. L’auteur, Robert Stone, journaliste correspondant de guerre, mort en 2015 à l’âge 77 ans, avait obtenu en 1974 pour cet ouvrage le National Book Award. Le roman sera adapté au cinéma par Karel Reisz en 1977.

Le récit commence au Vietnam pendant la guerre, au début des années 70. John Converse, journaliste au service d’une feuille de choux sans intérêt, y séjourne pour ramener quelques articles mais surtout essayer d’y récolter la matière nécessaire à l’écriture d’un livre ou d’une pièce de théâtre. Il évite la ligne de front et reste essentiellement à l’arrière pour se défoncer et fréquenter les maisons closes de Saïgon. Il décide alors, après avoir mis de côté ses “objections morales“ comme il dit, de faire rapatrier trois kilos d’héroïne aux Etats-Unis. Il demande pour cela à un vieil ami à lui, Ray Hicks, ancien marine, moyennant contribution financière, de faire passer en douce cette poudre blanche aux Etats-Unis. La femme de John Converse, Marge, est sensée réceptionner le produit qui sera alors revendu sur le territoire américain.

Mais bien entendu, les choses ne vont pas se passer comme prévu, car l’agent du FBI Enthei, accompagné de deux pseudo agents très spéciaux et brutaux, Smitty et Danskin, attendent l’ex-GI, qui fuit en embarquant avec lui Marge. A son retour au bercail, John Converse est pris en otage par les trois agents qui convoitent la marchandise. Débute alors une longue course poursuite qui se termine dans le désert du Nouveau-Mexique en compagnie du gourou d’une communauté hippie.

Pour supporter la douleur de la fuite, Marge, qui a dû laisser de côté sa fille et qui n’a qu’une envie c’est que tout ça s’arrête vite, consomme régulièrement du Dilaudid (analgésique opioïde) et l’héroïne à disposition. Elle expérimentera l’injection pendant le trajet avec l’aide de Ray.

Le roman nous rappelle à quel point les psychotropes ont eu leur importance au Vietnam pour supporter le stress des combats et la douleur des blessures morales et physiques. La consommation que les soldats firent de l’alcool, de la marijuana, de l’opium, des amphétamines, des barbituriques et de l’héroïne, quasiment pure et facile d’accès dans cette région, reflète assez bien l’usage récréatif mais aussi thérapeutique que l’on peut avoir d’une substance dans un contexte donné, rappelant le don d’ubiquité des drogues à la fois remède et poison. Les GI, de retour chez eux, ont ramené dans leurs bagages cette poudre véritablement blanche et pure qui fut considérée alors comme responsable d’une débâcle américaine que le président Nixon a en partie mise sur le compte des usages aux combats. Ceci bien entendu pour alors mieux déclarer sa guerre à la drogue…

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