Roman / “Stupéfiants“ de Alexandre Kauffmann

couverture   Contrairement à ce que pourrait laisser penser le bandeau qui recouvre la couverture de ce nouveau roman d’Alexandre Kauffmann, édité chez Flammarion en janvier 2017, le récit ne tourne pas ici autour des usages de poudre. Les quelques rails de blanche, sur fond noir, prolongées des quelques mots suivants : “presque innocent“, et un titre aussi court (un brin racoleur), sont loin malheureusement, ou heureusement, de donner une idée juste de ce dont il s’agit ici. Oui il est question de trafic de stupéfiants, en l’occurrence d’héroïne blanche (plus raffinée que la brune que l’on trouve le plus souvent en vente dans les rues), mais il est question aussi du rapport désacralisé et décomplexé qu’entretient une génération avec des usages récréatifs, mais aussi surement parfois auto-thérapeutique. Résumons l’histoire : Thomas, journaliste freelance d’une quarantaine d’années, est réveillé en pleine nuit par un Commandant de police, le Commandant Fleury, qui le convoque sur les lieux d’un accident, à Villetaneuse, en Seine-Saint-Denis en région parisienne, pour identifier le corps mort d’un jeune homme qui a percuté en scooter un tramway. Sa sacoche contenait deux cent cinquante grammes d’héroïne blanche et son portable le numéro de téléphone du journaliste. La police veut en savoir plus. Thomas ne peut identifier l’individu, mais sait reconnaître un Massaï quand il en voit un. Il revient en effet d’un long séjour en Tanzanie, pays qu’il connaît bien pour y avoir vécu cinq ans et y avoir réaliser un reportage sur la confiscation des terres Massaï. Thomas est contraint, malgré son presque “sentiment d’innocence“, de collaborer avec la police, et finit par s’impliquer totalement car il craint que son ex petite amie Grace, laissée en Tanzanie, soit en danger. La découverte par la suite d’une jeune femme assassinée d’origine africaine, confirme le lien entre l’enquête et des affaires de trafics entre l’Afrique Orientale et la France, trafics dans lesquels sont impliqués un ami de Thomas, Jaffa, et un distributeur en France, le “sergent“, sur lequel sont mobilisées les recherches de la police, car il est mêlé aussi à du trafic d’arme et de la prostitution. Le jeune journaliste peut aider la police, et l’Inspecteur Karim, son ami policier qui mène l’enquête, car il connaît aussi bien les boites africaines que le milieu bourgeois parisien et celui des revendeurs de Seine-Saint-Denis. Sont présentées dans ce roman les collisions possibles entre la politique, avec ses enjeux territoriaux en Afrique, et la manne financière que peut représenter un trafic d’héroïne à petite ou grande échelle. Ce sont alors les petites mains du trafic, mules qui font le voyage entre l’Afrique et l’Europe ou simples revendeurs ou pourvoyeurs sur place, qui font les frais d’une course effrénée au numéraire. Notre protagoniste, journaliste oisif, n’est pas concerné par ce trafic mais en découvre l’impact malgré lui. Probablement aurait-il préféré, avec sa sœur et ses amis du “Club chômage“, continuer à picoler, snifer de la MDMA ou de la coke, sans être confrontés à tout ça. Heureusement, il ne s’agit pas dans ce roman d’asséner une quelconque morale qui consisterait à culpabiliser les usagers, mais simplement peut-être d’essayer de comprendre que le chemin entre le producteur et le consommateur est parfois complexe, semé d’embuches pour certains, et que les enjeux dépassent souvent les simples usages de psychotropes…

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