ALCOOL / Alcool et Cancer : la fracture entre les scientifiques et les alcooliers

Les cancers sont une réelle préoccupation de la population française, qui est le plus souvent en accord avec les mesures de prévention prônées par l’Etat et les cancérologues. Mais, parmi les facteurs de risques, elle sous-estime le plus souvent le rôle que peut jouer l’alcool sur l’apparition de certains cancers et ce le plus souvent sans être alcoolo-dépendant.

Alcool

 

 

 

 

 

Les cancers sont une réelle préoccupation de la population française, qui est le plus souvent en accord avec les mesures de prévention prônées par l’Etat et les cancérologues. Mais, parmi les facteurs de risques, elle sous-estime le plus souvent le rôle que peut jouer l’alcool sur l’apparition de certains cancers et ce le plus souvent sans être alcoolo-dépendant. L’alcool est le deuxième facteur de risques évitable (juste après le tabac) pour l’apparition de cancer : 27894 cancers sont attribuables à l’alcool en France en 2015, soit 8% de l’ensemble des nouveaux cas de cancers (8,4% pour les hommes et 7,3% pour les femmes. (Source http://lesdonnees.e-cancer.fr). Ces cancers liés à l’alcool entraînent 15000 morts chaque année (la pollution en entraîne 400).

L’alcool augmente le risque de la plupart des cancers pour les scientifiques

Ceci se vérifie particulièrement pour des cancers comme le cancer de la bouche, du pharynx, du larynx, de l’œsophage, du colon-rectum, du sein et du foie (voir l’article de Allosanté sur le sujet). Les cancers de l’œsophage sont particulièrement causés par l’alcool puisque 80% d’entre eux sont issus d’une consommation d’alcool trop importante. Le risque est proportionnel aux doses consommées. Mais toutefois, le risque de cancer peut apparaître aussi chez certains dès le premier verre (en particulier pour le cancer du sein).

Sur les courbes ci-dessous, on remarque que le risque de cancers de la bouche est multiplié par 4 à 5 verres/jour; celui du foie et du sein est augmenté de 20% à 2 verres/jour.

 

 

 

 

 

 

 

 

Source : Jurgen Rehm, représentant la proportion de risques de cancer par rapport à la quantité d’alcool consommée. 10g = 1 verre

La perception du risque est similaire en Suisse :  selon le site Addiction Suisse, la population est nettement plus au fait des autres conséquences négatives de la consommation d’alcool. Plus de 85% des personnes interrogées ont en effet indiqué que l’alcool peut être à l’origine d’accidents, de maladies du foie, d’intoxications et de problèmes d’ordre psychique, alors qu’il n’y a en a que 24% qui soit au courant des liens entre alcool et cancer du sein). Et comme toujours les personnes les moins informées sont celles ayant des consommations à risques ou problématiques.

Cependant, malgré des dangers avérés appuyés sur des études scientifiques indiscutables,  la presse  non-scientifique et l’opinion publique semblent être peu au fait du sujet. Est-ce dû à une méconnaissance des travaux scientifiques? Un manque de diffusion de ces thématiques ? Y’a-t-il une omerta sur les dangers de l’alcool en France ? Les industriels de l’alcool déconstruisent-ils le rôle réel de l’alcool dans l’apparition de certaines maladies graves ?

L’alcool est peu impliqué dans l’apparition de cancers pour les alcooliers

Une étude suédoise, parue dans Drug and Alcohol review montre que certaines sociétés vendant de l’alcool produisent de l’information biaisée dans le but de semer la confusion dans la littérature scientifique qui cherche à établir les dommages de la consommation d’alcool, même modérée. L’étude a été menée sur les contenus proposés par les sites internet des alcooliers dans le monde, le plus souvent destinés à minimiser les répercussions sanitaires de l’alcool voire même de montrer un côté bénéfique à une consommation modérée. Le résultat de l’étude est sans appel, 24 des 26 sites analysés ont été identifiés comme produisant de l’information biaisée voire totalement fausse ou sans fondement scientifique. Par exemple, sans toutefois omettre le lien entre cancer et alcool, le risque est minimisé dans les contenus en le noyant avec d’autres risques (tabac, alimentation…) afin de dédouaner le rôle de l’alcool.

Par exemple, en France d’après Vin et Société, l’alcool est bénéfique pour les cancers digestifs

Dans sa rubrique « Eclairer », le site Vin & Société propose, de façon pseudo-scientifique, une série d’études destinées à montrer que le vin consommé avec modération ne serait pas dangereux pour la santé et pourrait même avoir des effets bénéfiques :

 

 

« Des pistes sérieuses font émerger un effet bénéfique dans la prévention du cancer du rein…. »

Contrairement à toutes les données scientifiques sérieuses, le vin est ainsi présenté comme bénéfique pour prévenir les cancers colorectaux et de l’œsophage, deux des principaux cancers causé par l’alcool. Il faut aussi remarquer que ce site a pour principal objectif de valoriser les consommations modérées mais ne présente pas les dommages liés aux consommations plus importantes. Et surtout, le poids sur l’état de santé des français de ces consommations. Mais les alcooliers ont besoin des consommations excessives pour être rentables : Rappelons que 90% de l’alcool acheté est consommé par les 30% des français ayant des consommations excessives ou nocives.

Le tire-bouchon de la discorde

 

Le conflit devient d’autant plus aigu que le président de la Vin & Société, les syndicats viticoles et même la FNSEA viennent de prendre publiquement position pour retirer le tire-bouchon apparaissant sur le visuel de prévention des cancers liés à l’alcool de l’INCA,  « Nous avons demandé que le ministère stoppe cette campagne ou du moins retire le tire-bouchon sur le visuel ». Le tire-bouchon a été jugé stigmatisant par la communauté des acteurs du vin.

 

 

 

Ce type de campagne existe déjà largement dans les autres pays d’Europe, c’est peut-être ce qui explique leur mobilisation rapide.

Il ne devrait plus être admissible que les alcooliers puissent répandre de telles contre-vérités. La volonté d’informations justes existe pour la pollution, la nourriture et d’autres facteurs cancérigènes. Il devrait désormais en être de même pour l’alcool.