Anorexie mentale : un hyper contrôle qui a un prix

La régulation des émotions est nécessaire pour atteindre avec succès les objectifs que l’on se fixe à court et à long terme. Cependant, trop de contrôle peut également être nuisible.

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La régulation des émotions est nécessaire pour atteindre avec succès les objectifs que l’on se fixe à court et à long terme. Cependant, trop de contrôle peut également être nuisible. Dans le cas de l’anorexie mentale, ne pas manger malgré une maigreur extrême et des troubles endocriniens représente un exemple de « trop » de maîtrise de soi.

Des chercheurs ont évalué si la régulation volontaire des émotions positive chez des patientes avec une anorexie mentale était associée à des conséquences négatives (en terme de thymie, de ruminations et de cinétique pondérale).

Trente-cinq patientes atteintes d’anorexie mentale et trente-cinq témoins sains appariés selon l’âge ont réalisé un paradigme de régulation des émotions durant une imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) après un jeûne nocturne. La tâche exigeait de réduire les émotions induites par des images connotées positivement (chiots, scènes de famille heureuse ou de sport amusant) par « une mise à distance » (comme un observateur neutre). Un score de régulation neurale a été calculé à partir des réponses enregistrées dans une région cérébrale d’intérêt liée à la récompense, le striatum ventral. En complément des données d’imagerie, les auteurs ont évalué les ruminations et affects négatifs en conditions écologiques de vie quotidienne grâce à la méthode EMA (Ecological Momentary Assessment), utilisant des smart-phones, avec une évaluation pluriquotidienne pendant les 15 jours suivant la passation de l’IRMf.

Le score de régulation neurale indiquant une activation réduite du striatum ventral pendant la régulation des émotions a été utilisé comme facteur prédictif des mesures d’EMA.

Les auteurs ont retrouvé que la régulation de l’activité du striatum ventral était associée à des préoccupations corporelles accrues et à une augmentation des affects négatifs chez les patientes mais pas chez les contrôles sains. De même, un lien a été retrouvé entre les mesures d’indice de masse corporelle et une régulation plus importante dans le striatum ventral avec une moins bonne réponse au traitement après 60 et 90 jours.

Ces résultats identifient un substrat neural à l’altération de la régulation des émotions dans l’anorexie mentale avec des conséquences négatives. Sur le plan thérapeutique, mettre l’accent sur des stratégies d’adaptation de régulation des émotions, comme l’acceptation émotionnelle, avec une diminution de cet « hypercontrôle »,  pourrait favoriser le bien-être psychologique global et la rémission chez les patients souffrant d’anorexie mentale.

Par Louise Carton

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