Arrêter de fumer lors du diagnostic améliore la survie globale des patients atteints d'un cancer du poumon

Tabac

Le cancer broncho-pulmonaire représente le cancer le plus fréquent parmi ceux liés au tabac (80%), avant le cancer des voies aero digestives supérieures (70%), et le cancer de la vessie (50%). Le tabac entraîne la méthylation (ADN) et la désacétylation (histones) de certains gènes impliqués dans le développement du cancer du poumon (1), et la survenue d’un cancer 30 ans plus tard, plus fréquent parmi les hommes que parmi les femmes. Rappelons que le tabac est responsable de 90% des cancers du poumon (2) et que l’on peut observer cette pathologie chez les anciens fumeurs, même si le risque est inférieur à 10% (3). Le tabac est responsable de 75 000 décès chaque année en France, dont 45 000 décès par cancer ; on dénombre 1 100 décès par cancer liés au tabagisme passif.

Le tabac augmente également le risque de développer un 2ème cancer (prostate, ovaire, colo-rectum) de 30% pour une consommation journalière de 10 cigarettes et de 18% pour 10 paquets-années (1 paquet de 20 cigarettes par jour pendant 10 ans, ou bien ½ paquet de 20 cigarettes par jour pendant 20 ans). L’arrêt total du tabac après un cancer du poumon permet de réduire le risque de 2ème cancer de 83% (4).

Le cancer du poumon se classe au deuxième rang mondial en termes d’incidence, avec plus de 2,2 millions de nouveaux cas estimés survenus en 2020, et au premier rang en termes de mortalité, avec près de 1,8 million de décès causés (5).

Saverio Caini, de l’Institut de recherche sur le cancer de Florence (ISPRO), et collaborateurs ont effectué une revue de la littérature et une méta analyse, publiée cette année dans le Journal of Thoracic Oncology, afin de connaître l’impact de l’arrêt du tabac lors du diagnostic ou au début du traitement d’un cancer du poumon sur la survie des patients. Ils rappellent que le taux de survie à 5 ans est de 25% (tous stades confondus) pour le cancer non petites cellules (CNPC), et de 7% pour le cancer à petites cellules (CPC).

Méthode

A partir des bases de données bibliographiques Medline et EMBASE, 566 articles ont été pris en compte, mais seulement 21 articles ont été conservés dans la revue systématique et la méta analyse. En effet, les critères suivants étaient nécessaires : le pays et l’année de l’étude (entre 1980 et 2019), le sexe, l’âge (entre 60 et 70 ans, le type de tumeur (CPC et CNPC), le stade du cancer lors du diagnostic, ainsi que la durée de suivi. Ainsi, 10 938 patients ont été retenus dans cette étude, ainsi que l’arrêt ou non du tabac lors du diagnostic de cancer (dans un délai de 12 mois, avant ou après).

L’analyse des données de survie était effectuée (dans chaque étude) à l’aide du modèle de Cox ou selon la méthode de Kaplan-Meier, et la méta analyse a étudié l’hétérogénéité, la variabilité entre les études (à l’aide du coefficient I²).

Résultats

Lorsque le type de cancer est connu (CNPC ou CPC), l’arrêt du tabac est bénéfique en termes de durée de survie : augmentation de 23% et 21% respectivement pour les CNPC et les CPC. Cet écart de 2 points n’est cependant pas significatif.

Lorsque le type de cancer n’est pas connu, l’arrêt du tabac permet d’augmenter de 29% la survie des patients atteints de cancer du poumon.

Cette étude montre à nouveau le bénéfice à arrêter de fumer même si un cancer du poumon est diagnostiqué.

Les auteurs précisent l’impact du changement de comportement (arrêt du tabac) sur l’épigénome, et le degré de méthylation de l’ADN en particulier. Un sujet qui avait fait l’objet d’un article sur le site Addict’AIDE il y a quelques mois.

L’Institut national du cancer (InCA) a édité un livret intitulé « Arrêt du tabac dans la prise en charge du patient atteint de cancer – Systématiser son accompagnement » afin de sensibiliser les professionnels de santé à cette problématique.

EN SAVOIR PLUS

Dr Philippe Arvers (1,2,3)

1 – Observatoire Territorial des Conduites à Risques de l’Adolescent (MSH-UGA)

2 – 7ème Centre Médical des Armées (76ème Antenne médicale de Varces)

3 – Institut Rhône Alpes Auvergne de Tabacologie (Lyon)

Références bibliographiques

1 Gao X, Zhang Y, Breitling LP, Brenner H. Tobacco smoking and methylation of genes related to lung cancer development. Oncotarget. 2016 Sep 13;7(37):59017-59028.

2 Srkalović G. Lung Cancer: Preventable Disease. Acta Med Acad. 2018 May;47(1):39-49.

3 González-Marrón A, Martín-Sánchez JC, Matilla-Santander N, Cartanyà-Hueso À et al. Estimation of the adult population at high risk of developing lung cancer in the European Union. Cancer Epidemiol. 2018 Dec;57:140-147.

4 Aredo JV, Luo SJ, Gardner RM, Sanyal N et al. Tobacco Smoking and Risk of Second Primary Lung Cancer. J Thorac Oncol. 2021 Jun;16(6):968-979.

5 The Global Cancer Observatory 2020. IARC, Lyon. https://gco.iarc.fr/today/data/factsheets/cancers/15-Lung-fact-sheet.pdf