L’alcool améliore t’il vraiment notre capacité à parler une langue étrangère ? Une étude originale de Journal of Psychopharmacology

Les effets délétères de l’alcool sur les fonctions exécutives sont bien établis. Or, les capacités à parler une langue étrangère reposent sur ces fonctions. Lorsque l’on parle une langue étrangère, les champs lexicaux de chaque langue (native et étrangère) sont activés au même moment et entrent en compétition.

Alcool

Les effets délétères de l’alcool sur les fonctions exécutives sont bien établis. Or, les capacités à parler une langue étrangère reposent sur ces fonctions. Lorsque l’on parle une langue étrangère, les champs lexicaux de chaque langue (native et étrangère) sont activés au même moment et entrent en compétition. La sélection du bon champ lexical dépend alors du contrôle inhibiteur. Puisque l’alcool altère le contrôle inhibiteur, il pourrait être attendu que la consommation d’alcool altère la fluence verbale. Cependant, dans la croyance populaire, et comme mis en exergue dans différents médias, l’alcool améliorerait notre capacité à parler étranger. Deux hypothèses peuvent être proposées. La première est que l’alcool pourrait améliorer les capacités réelles à parler dans une langue étrangère. La deuxième est que l’alcool pourrait améliorer la perception du sujet de ses propres capacités à parler étranger. En effet, des études ont montré que la consommation d’alcool conduisait à une confiance excessive dans l’auto-évaluation de tâches cognitives. Une amélioration de la confiance en soi sous alcool pourrait ainsi être associée à une perception plus positive de ses propres performances, même si cela ne reflète pas exactement la performance en elle-même.

Ces hypothèses n’ayant jamais été évaluées, des chercheurs ont évalué les effets d’une consommation aigue d’alcool sur la performance à parler une langue étrangère chez des sujets en apprentissage de la langue, à la fois par une auto-évaluation mais également par l’observation de personnes extérieures.

Cinquante sujets, ayant comme langue native l’allemand et ayant récemment appris le néerlandais ont reçu soit de l’alcool (en moyenne 0,32g/kg), soit de l’eau. Après cette prise, les participants prenaient part à une discussion standardisée en néerlandais avec une évaluation à l’aveugle par un observateur extérieur. La discussion était enregistrée et les capacités à parler la langue étaient évaluées par deux néerlandais natifs aveugles de la condition reçue. Les sujets évaluaient également eux-même leur propre capacité à parler le néérlandais.

Les sujets ayant consommé de l’alcool avaient de meilleures évaluations  par les observateurs extérieurs concernant leur capacité à parler le néerlandais par rapport aux sujets ayant pris de l’eau (p=0,02), notamment une meilleure prononciation. Cependant, l’alcool n’avait pas d’effet sur l’auto-évaluation de ces propres performances. L’amélioration de la fluence pourrait être liée à l’effet désinhibiteur de l’alcool. En effet, l’alcool à faible dose pourrait agir sur «  l’angoisse de la langue étrangère », une anxiété négativement associée à la perception de ses capacités et à sa compétence linguistique propre.

Ainsi, une consommation aigue d’alcool pourrait avoir des effets bénéfiques sur la prononciation d’une langue étrangère chez des sujets qui ont récemment appris cette langue.

Par Louise Carton 

Consulter en ligne