Le « paquet neutre » de tabac est-il moins attirant pour le cerveau? Une étude expérimentale parue dans Drug and Alcohol Dependence.

Après l’Australie en 2011, la décision controversée d’une standardisation du paquet de tabac a été appliquée dans l’Union Européenne en 2016. Par ailleurs, depuis 2016, les fabricants de tabac ont l’obligation d’afficher sur au moins 65% du paquet des mises en garde concernant la santé, à l’aide de textes, de photos, et de donner des informations sur l’arrêt du tabac.

Tabac

Après l’Australie en 2011, la décision controversée d’une standardisation du paquet de tabac a été appliquée dans l’Union Européenne en 2016. Par ailleurs, depuis 2016, les fabricants de tabac ont l’obligation d’afficher sur au moins 65% du paquet des mises en garde concernant la santé, à l’aide de textes, de photos, et de donner des informations sur l’arrêt du tabac.

La France et le Royaume-Uni sont allés plus loin en instaurant le « paquet neutre » : standardisation de l’écriture des marques, fond marron foncé peu attractif, contrôle des informations délivrées (notamment suppression de l’indication du taux de nicotine et de monoxide de carbone, suppression des allégations de bénéfices sur la santé). Le but du paquet neutre étant de baisser l’attractivité des produits tabagiques, en particulier auprès des jeunes, d’attirer l’attention sur les messages portant sur les effets délétères sur la santé, et de bannir les fausses croyances. Tout cela afin d’encourager l’arrêt du tabac ou d’empêcher le début des consommations.

Il est important d’évaluer si ces mesures sont efficaces. La première façon d’évaluer est de mesurer l’évolution de l’usage de tabac et des ventes. On sait qu’au Royaume-Uni, l’usage de tabac s’est littéralement effondré, avec un taux d’usagers compris entre 10 et 15% de la population, contre de plus de 30% en France. Mais l’évaluation des taux d’usage ne permet pas d’apprécier l’effet spécifique d’une mesure. C’est la politique globale de santé publique anti-tabac qui se reflète sur les données épidémiologiques. Parfois, des facteurs sociétaux viennent se greffer sur les décisions du politique. Par exemple, l’arrivée de la vape a eu énormément d’impact outre-manche, et les pouvoirs publics n’ont fait que suivre la vague. En France, l’usage de tabac reste élevé malgré des mesures volontaristes, et il est difficile de déterminer les raisons exactes de cette stagnation.

Une manière différente d’évaluer l’effet du paquet neutre est permise par les neurosciences. C’est le cas de cette étude de psychologie expérimentale, réalisée chez 47 fumeurs volontaires. Les chercheurs ont analysé les mouvements des yeux des participants pendant qu’on leur faisait visionner des images de paquets de tabac version avant 2016 et version après 2016, afin de mesurer l’efficacité de ces nouvelles mesures de santé publique.

Les auteurs ont ainsi montré que les fumeurs portaient plus attention à la marque qu’aux mises en garde sur la santé avec les anciens paquets de tabac, alors que c’était tout l’inverse pour les nouveaux paquets : plus d’attention portée sur les conséquences sur la santé que sur les marques. Pour les paquets neutres, les yeux se fixaient ainsi en premier et restaient posés plus longtemps sur les images ou textes évoquant les effets délétères du tabac, et ce indépendamment du niveau de consommation tabagique.

Reste à savoir si le fait que les fumeurs soient plus attentifs aux messages concernant la santé, et moins attirés par le logo de la marque les incite réellement à modifier leur consommation tabagique en pratique. C’est là que l’on devra revenir in fine aux données épidémiologiques.

Par Julia d’Aviau de Ternay (interne de psychiatrie à Lyon) & Benjamin Rolland (SUAL, Lyon)

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