
Un anesthésiant encore utilisé aujourd’hui
Incolore et inodore, le protoxyde d’azote présente une grande diffusibilité et une faible solubilité dans les tissus, ce qui explique son court délai d’action. Il n’est pas transformé (« métabolisé ») par l’organisme. Par ailleurs, il est éliminé rapidement par voie pulmonaire, dès lors que l’on arrête son administration.
À l’heure actuelle, le protoxyde d’azote est encore utilisé en anesthésie, sous forme d’un mélange composé à 50 % d’oxygène. Appelé MEOPA (Mélange Équimolaire d’Oxygène et Protoxyde d’Azote), ce dernier ne doit pas être confondu avec le protoxyde d’azote pur, comme le souligne le psychiatre Daniel Annequin, spécialiste de la douleur.
Peu onéreux, efficace, d’action rapide et réversible, cet analgésique est utilisé lorsqu’il faut réaliser des gestes douloureux de courte durée en dehors du bloc opératoire (changement de pansements douloureux, brûlés, réalisation de ponction lombaire, sutures, etc.). Il est aussi employé dans les salles d’accouchement, pendant le travail obstétrical.
En France, le MEOPA est le médicament de référence pour les actes et les soins douloureux pédiatriques. Son utilisation est autorisée en médecine libérale, notamment par les dentistes (avec un embout nasal). S’il peut être parfois à l’origine d’effets indésirables (sensations vertigineuses, nausées, vomissements, agitation ou endormissement…), le rapport bénéfice-risque en faveur de son usage est encore considéré comme positif.
Des modalités pratiques d’utilisation en milieu médical ont toutefois été définies, en particulier pour tenir compte de ses effets sur la vitamine B12.
C’est cette toxicité qui est notamment responsable des graves effets observés en cas consommation répétée ou chronique de protoxyde d’azote pur, lorsque son usage « récréatif ».
Hors de l’hôpital, des détournements risqués
Le protoxyde d’azote n’est pas utilisé uniquement en milieu médical. Il est par exemple aussi employé dans le monde du tuning automobile, comme comburant afin d’accroître la puissance des moteurs, ainsi que dans le domaine culinaire, en tant que gaz de compression/propulsion, notamment dans les siphons de cuisine tels que ceux utilisés pour la crème chantilly.
Ce qui pose problème, c’est que ces cartouches sont détournées de leur usage et inhalées, le plus souvent via des ballons de baudruche. Les effets recherchés par les usagers, souvent des adolescents et des jeunes adultes, sont notamment l’euphorie, l’hilarité, le fou rire, la distorsion des perceptions (auditives, visuelles), la sensation de dissociation, le « flottement », et la désinhibition. Ces effets ne durant que deux à trois minutes, les prises sont souvent répétées.
Or, le protoxyde d’azote présente une toxicité neurologique. Il inactive de façon irréversible la vitamine B12. Cette vitamine, essentielle à la fonction nerveuse (ainsi qu’à la formation et à la maturation des globules rouges et à la synthèse de l’ADN) est principalement apportée par les aliments d’origine animale. Stockée dans le foie, elle permet le bon fonctionnement du cerveau (synthèse de neurotransmetteurs) et du système nerveux (myélinisation des neurones).
L’inactivation de la vitamine B12 par le protoxyde d’azote réduit petit à petit le stock hépatique et entraîne une carence d’apport neurologique, au niveau cérébral et des neurones.
Les effets sur la santé
Les risques liés à l’utilisation récréative de protoxyde d’azote peuvent être immédiats : brûlures par le froid du gaz libéré directement depuis la cartouche, asphyxie liée au manque d’oxygène et aux troubles cardiaques induits, perte de connaissance, désorientation temporo-spatiale, risque de chute, troubles de la vigilance, vertiges, surdosage avec troubles moteurs et cardio-respiratoires.
Les complications, en cas de consommations répétées à intervalles rapprochés ou à forte dose, peuvent être sévères, et parfois irréversibles : dépendance, atteintes neurologiques et neuromusculaires (se manifestant par des douleurs, des pertes de sensibilité, de force au niveau des membres, des troubles de la marche, une incontinence), troubles psychiatriques, atteintes cardiaques et troubles de la fertilité.
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