Tabac – La place du tabac dans notre société

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La fumée à travers les âges : entre rituels, thérapie et plaisir 

Depuis les débuts de l’humanité, la fumée a été étroitement liée aux rituels et aux croyances, jouant un rôle essentiel dans notre histoire, souvent entourée d’une aura sacrée. 

Elle a également trouvé sa place dans la thérapeutique, prescrite par les médecins de l’Antiquité pour soulager divers maux. 

Avec le temps, la fumigation, initialement thérapeutique, a glissé vers le plaisir, associant des plantes diverses. 

La pipe, héritage de l’Antiquité, symbolisait ce plaisir. Fumer s’est même infiltré dans l’art, comme en témoignent des représentations anciennes d’un roi du VIIème siècle av. J-C exhumées lors des  fouilles d’Herculanum, illustrant l’ancienneté de cette pratique. La fumée a donc traversé les époques, jouant des rôles multiples, que ce soit rituel, thérapeutique, ou source de plaisir. 

Lors des premières expéditions de « Découverte des Amériques », les colons espagnols et portugais découvrent le tabac, les natifs l’utilisant à des fins médicinales et sacrées. 

Cette fumée sacrée était inhalée ou insufflée. Les colons commencent à en vanter les vertus dès leur retour en Europe en 1493.

En 1520, les premières graines sont importées et les premières plantations apparaissent au Portugal. 

Jean Nicot, ambassadeur de France à Lisbonne, recommande le tabac à la reine Catherine de Médicis pour soulager ses migraines. Surnommé « Herbe à la Reine », le tabac devient à la mode dans toutes les cours d’Europe, amorçant ainsi l’ère du tabac. 

Puis vient le temps des premières oppositions

De Jacques Ier Roi d’Angleterre au Tsar Michel Fedorovitch, en passant par le Sultan Mourad IV et les Empereurs Ming, le tabac est condamné à travers le monde. Il est associé au “Mal”, à l’horreur et à l’enfer. Les gouvernements européens réagissent à cette invasion du tabac par des condamnations sévères et des tortures. Au XVIIe siècle, le Tsar Michel Fedorovitch ordonne la torture pour obtenir les noms des fournisseurs de tabac, suivi de mutilations. En parallèle, le Sultan Mourad IV sanctionne de mort ceux surpris en train de fumer. Les Empereurs Ming décrètent également la peine capitale pour les consommateurs de tabac. Le tabac est assimilé à une « effronterie » nouvelle et intolérable. Cependant, avec le temps, la sévérité des châtiments s’atténue et le tabagisme se banalise. 

Le monopole d’État

La France, sous Richelieu, instaure une taxation du tabac en 1629. 

Le monopole de fabrication et de vente est créé en 1681 par Colbert et supprimé en 1789, il est ensuite rétabli par Napoléon. Il faut attendre les années 2000 pour voir la fin de ce monopole d’État. 

Consommation, dangerosité et législation

Après la Seconde Guerre mondiale, la consommation de tabac explose. Entre 1950 et 1976, la consommation annuelle en France passe de 62 à 102 tonnes. Les publicitaires associent le tabac à la virilité, l’émancipation, l’affirmation de soi et la convivialité. Cependant, dès 1950, des scientifiques comme le Professeur André Lemaire alertent sur les dangers du tabac. Les liens avec les cancers de la langue et des poumons sont établis par les professeurs britanniques Richard Doll et Austin Bradford Hill. 

Il faudra pourtant attendre 1976 et la loi Veil en France  pour cibler la publicité, introduire des interdictions de fumer et imposer des avertissements sur les paquets. 

Vers un avenir sans fumée ? 

En 1987, un rapport du Professeur Albert Hirsch souligne les dégâts sanitaires et sociaux liés au tabac. La France commence à considérer le tabac comme une toxicomanie légale. 

La loi Evin de 1991 et les campagnes d’information réduisent progressivement la consommation de tabac : « Ne pas fumer est la norme ». 

Ainsi, en 70 ans les représentations du tabac ont évolué : d’un symbole de virilité et de liberté à un produit dont la consommation est dangereuse pour soi et l’entourage. 

La science et la loi ont transformé son image, en faisant passer le message de « tolérance et prévention » des années 50 à « ne pas fumer est la norme » des années 90. 

Au fur et à mesure des réglementations venant encadrer l’usage du tabac, des disparités apparaissent dans la population, les plus précaires et les moins diplômés payant un lourd tribut à la maladie. Il en résulte qu’aujourd’hui le fumeur est de plus en plus montré du doigt alors même qu’il est le premier à souffrir de cette addiction. Les plus marginalisés et les plus pauvres se méfient du mélange des messages de santé publique et de la hausse des prix qu’ils jugent liberticides et peu en leur faveur.

Le tabac reste un sujet complexe et évolutif, au cœur des enjeux de santé publique et de société. La lutte contre le tabagisme continue avec l’objectif d’une société sans tabac.

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