Une nouvelle Cochrane Review sur les interventions pharmacologiques pour usagers chroniques de benzodiazépines.

Les benzodiazépines sont prescrites pour environ 4% de la population générale, avec une prévalence accrue chez les populations psychiatriques et les populations âgées. Leur utilisation prolongée est une pratique courante malgré les recommandations d’utilisation à court terme...

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Les benzodiazépines sont prescrites pour environ 4% de la population générale, avec une prévalence accrue chez les populations psychiatriques et les populations âgées. Leur utilisation prolongée est une pratique courante malgré les recommandations d’utilisation à court terme et il est souvent difficile d’organiser un sevrage des benzodiazépines après plusieurs semaines de traitement du fait de l’installation d’une dépendance physique et psychologique.

La Cochrane Database of Systematic Reviews publie des synthèses médicales de la littérature d’un très haut niveau méthodologique, et qui font ainsi référence au niveau international. Cette revue a été ici réalisée afin de déterminer si des interventions pharmacologiques peuvent faciliter l’arrêt d’un traitement par benzodiazépines à long terme. Elle a également pour objectif d’évaluer plus précisément les effets et la tolérance de ces traitements.

Ainsi, 38 essais contrôlés randomisés, comprenant 2295 participants, ont été inclus. Ils comparaient un traitement pharmacologique à un placebo, une absence d’intervention ou une autre intervention pharmacologique chez des adultes traités par benzodiazépines depuis au moins deux mois et/ou remplissant des critères de dépendance aux benzodiazépines. L’âge moyen des participants était de 50 ans et la majorité était des femmes.

Les résultats montrent un effet potentiellement positif du valproate et des antidépresseurs tricycliques sur l’arrêt des benzodiazépines en fin d’intervention. La prégabaline, captodiame, paroxetine, antidépresseurs tricycliques et flumazénil pourraient également avoir un effet sur la réduction des symptômes de sevrage en fin d’intervention. L’effet de la paroxétine n’a toutefois pas persisté à long terme. De plus, la carbamazépine, prégabaline, captodiame, paroxétine et flumazénil ont permis une réduction des symptômes d’anxiété en fin d’intervention. Le valproate et la cyamémazine pourraient quant à eux réduire le taux rechute.

Aucun effet positif sur le sevrage n’a été démontré concernant le lithium, la buspirone, la mélatonine, le propanolol, la progestérone et deux traitements homéopathiques (« sédatif PC » et « Homéogène 46 »).

En revanche, l’alpidem et l’aspartate de magnésium ont entrainé des rechutes chez les patients qui consommaient des benzodiazépines et l’alpidem a augmenté l’apparition de symptômes de sevrage.

D’une façon générale, les effets indésirables n’ont pas été suffisamment signalés et l’un des essais sur le flumazénil a été interrompu en raison de graves réactions anxieuses.

En conclusion, étant donné le faible voire très faible niveau de preuves dont nous disposons actuellement, le petit nombre d’essais réalisé avec des nombres de participants limités ainsi qu’un financement important de l’industrie pharmaceutique, il n’est pas possible de tirer des conclusions fermes et proposer une conduite à tenir sur l’utilisation de stratégies médicamenteuses pour faciliter l’arrêt des benzodiazépines chez les utilisateurs chroniques. De plus, les effets indésirables des stratégies pharmacologiques explorées n’ont pas été suffisamment communiqués et n’ont pas permis une évaluation fiable. La recherche reste donc nécessaire dans ce domaine afin d’améliorer la prise en charge des patients dépendants aux benzodiazépines.

 

Louis Gouet, interne en psychiatrie, Lyon

Benjamin Rolland, Service Universitaire d’Addictologie Lyon (SUAL)

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