De nombreuses mesures permettent de se protéger de l’addiction aux jeux d’argent et de hasard. Qu’il s’agisse de l’accompagnement par des professionnels de santé ou des « pairs » (c’est-à-dire des personnes qui ont comme vous un jeu problématique), ou de mesures de protection et/ou d’interdiction de jeu, faisons le tour des actions concrètes qui peuvent vous aider dans votre démarche de changement.
Quelles mesures puis-je mettre en place par moi-même ?
Ainsi, vous pouvez décider d’arrêter toute forme de jeu, ou de continuer à jouer à certains jeux, de façon contrôlée. Voici quelques conseils pour limiter les risques liés à votre pratique des autres jeux :
- Repérer vos situations à risque de jeu : certaines situations ou des émotions peuvent provoquer des envies de jeu : l’ennui, la solitude, avoir de l’argent disponible, une dispute… une fois que vous les aurez repérées, vous pourrez plus facilement les anticiper et y faire face.
- Fixez-vous des limites d’argent : si vous avez décidé de jouer, il est prudent de fixer à l’avance la somme que vous souhaitez dépenser, en fonction de votre budget, et de ne pas dépasser cette limite. Lorsque vous irez jouer, n’ayez sur vous que cette somme d’argent, et en liquide uniquement. Vous pouvez également demander l’aide d’une personne de votre entourage ou d’un conseiller financier dans votre banque par exemple pour vous aider à contrôler vos moyens de paiement (plafond non modifiable sur la carte bancaire, confier votre carte de crédit à un proche lorsque vous allez jouer…).
- Fixez-vous aussi une limite de temps consacré au jeu à chaque fois que vous décidez de jouer. Pour vous aider à la respecter, n’hésitez pas à mettre une alarme sur votre téléphone par exemple.
- Evitez les occasions de jouer : si nécessaire, pendant un certain temps ne fréquentez pas les lieux de jeu. La proximité d’un lieu de jeu peut en effet constituer une occasion à laquelle vous rencontrerez des difficultés pour résister. De la même manière, consulter les sites de pronostics sportifs ou hippiques peut provoquer des envies de jeu.
- Changez vos habitudes : par exemple, si vous avez l’habitude de jouer en rentrant du travail, il peut être utile de modifier vos trajets pour vous assurer qu’une occasion de jeu ne se présente pas sur la route. Vous pouvez également modifier votre emploi du temps ou vos horaires lorsque cela est possible, toujours pour limiter les tentations de jeu. Par ailleurs, si vous avez dans votre entourage des amis ou collègues qui s’adonnent au jeu, vous pouvez limiter les sorties avec eux pendant un temps. Vous pouvez également les informer de vos efforts actuels pour arrêter de jouer ou garder une pratique de jeu modérée, afin que votre entourage ne vous incite pas à jouer.
- Faites le point sur votre comportement en lien avec le jeu : il est utile de se rappeler régulièrement sur quels principes sont basés les jeux d’argent et de hasard. Notamment, n’oublions pas que le hasard ne peut pas se contrôler ! Pour s’assurer de garder le contrôle sur le jeu, nous vous conseillons de faire de temps en temps une pause pendant le jeu et de réfléchir à ce que vous faites. En effet, dans le feu de l’action, vous pouvez imaginer pouvoir contrôler l’issue du jeu… Enfin, gardez toujours en mémoire ce qui vous motive à diminuer ou arrêter de jouer afin de bien garder la maîtrise sur votre pratique de jeu.
- Travaillez sur les émotions : les émotions occupent une place centrale dans le déclenchement des envies irrépressibles de jouer (« craving ») et la capacité à y résister, et peuvent donc être la cause d’une Après une tentative de diminuer sa pratique, ces envies de jouer pourront devenir de moins en moins envahissantes, mais au début, il peut être intéressant pour vous de prendre conscience de cette envie très forte, de l’accepter afin de pouvoir la mettre à distance.
- Pratiquez d’autres activités : le jeu peut être pour vous un moyen d’évasion afin d’échapper aux difficultés de la vie quotidienne ou à un sentiment de déprime, mais également un moyen de lutter contre l’ennui ou la solitude. Il est donc important de retrouver ou découvrir d’autres sources de plaisir. Réfléchissez aux activités que vous aimiez dans le passé et qui ont été abandonnées à cause du jeu, ou à d’autres que vous avez envie d’essayer. Certaines activités peuvent être planifiées spécifiquement lors de périodes à risque de jeu, par exemple le jour où vous recevez votre salaire, au cours de moments d’ennui ou de solitude…
Les mesures pour se protéger du jeu
La première mesure de protection qui peut être mise facilement en œuvre concerne les modérateurs de jeu, disponibles sur les sites de jeu en ligne agréés par l’Autorité Nationale des Jeux (ANJ). Voici la liste des modérateurs disponibles : https://anj.fr/les-moderateurs-de-jeu. Ces jeux sont les seuls qui sont légaux en France (la liste est à retrouver sur le site de l’ANJ : https://anj.fr/offre-de-jeu-et-marche/operateurs-agrees). Par exemple, vous ne les trouverez jamais sur les sites de jeu de casino en ligne, qui sont interdits en France. Les opérateurs de jeux agréés ont ainsi l’obligation de demander aux joueurs de fixer des limites afin d’encadrer leur activité. Ces autolimitations concernent quatre types de plafonds : les dépôts d’argent possibles sur 7 jours glissants, les mises par période de 7 jours, le temps de jeu (pour les jeux de cercle) et le seuil de retrait automatique (montant au-delà duquel l’argent du compte de jeu est reversé automatiquement sur le compte bancaire). Les joueurs doivent ainsi renseigner ces modérateurs au moment de créer leur compte de jeu en ligne, et peuvent les modifier à tout moment. En personnalisant ces montants pour les adapter à ses propres moyens, tout joueur peut ainsi limiter les éventuels dommages liés à une pratique excessive du jeu.
La seconde mesure de protection est de s’exclure soi-même des sites de jeu en ligne. Il suffit de faire la démarche en se signalant directement auprès d’eux. En effet, les sites de jeu en ligne agréés ont l’obligation de mettre en place un dispositif d’auto-exclusion volontaire qui permet au joueur de s’interdire lui-même l’accès à un site spécifique et pour une période déterminée (comprise entre 24h et 12 mois). Les modalités de la procédure dépendent de chaque site. Il suffit généralement d’envoyer un courriel ou de faire la demande directement dans votre compte joueur pour demander une exclusion. L’inconvénient de cette mesure, c’est qu’elle n’est valable que sur le site sur lequel la demande est faite. Il faut donc reproduire cette procédure pour tous les sites sur lesquels vous disposez d’un compte joueur et pour lesquels vous souhaitez faire une pause du jeu. Cette mesure ne concerne que les sites de jeu agréés par l’ANJ (sites de paris sportifs, de paris hippiques, de poker et offre de la Française des Jeux). Par définition, les sites illégaux (tous les casinos en ligne notamment, et les autres sites de jeu non agréés) ne respectent pas les obligations réglementaires qui permettent aux joueurs d’agir en prévention et ne proposent pas de dispositifs d’auto-exclusion. Au-delà des jeux en ligne, les casinos réels proposent également le même type de procédure d’auto-exclusion. Pour la mettre en œuvre, il suffit de demander à être inscrit sur la liste des personnes à ne pas recevoir (ANPR) dans le ou les casinos que vous fréquentez.
Vous pouvez également vous éloigner du jeu de façon plus globale en demandant vous-même à être interdit de jeux. L’interdiction volontaire de jeu permet d’être inscrit sur un fichier pour se voir interdire l’accès à tous les lieux de jeu bénéficiant d’un contrôle systématique de l’identité : les casinos, les clubs de jeux et les sites légaux de jeux d’argent. La démarche est strictement personnelle. Personne d’autre que vous ne peut faire cette demande, à l’exception d’un tuteur. La durée de cette interdiction volontaire de jeu est de 3 ans, renouvelables tacitement. Cette démarche peut se réaliser de deux manières différentes : en ligne ou par courrier. Elle peut se faire en ligne via le site de l’ANJ (https://anj.fr/ts/interdiction-de-jeux). Il vous sera alors demandé de fournir vos coordonnées complètes et une copie de votre pièce d’identité. Il est aussi possible d’adresser votre demande par courrier signé en mentionnant vos coordonnées. Vous devez y joindre une copie de votre pièce d’identité et l’envoyer au service interdiction de jeux de l’ANJ, 99-101 rue Leblanc, 75015 Paris. L’ANJ vous contactera par téléphone au créneau horaire que vous lui indiquerez. Vous serez alors interdit(e) de casino, de clubs de jeux et de sites de jeux d’argent en ligne pour une période de trois ans. A l’issue de ces 3 ans, soit l’interdiction sera maintenue tacitement pour une durée illimitée, soit vous pourrez faire la demande de levée de l’interdiction, si vous souhaitez pouvoir à nouveau jouer à ces jeux.
Enfin, la dépendance aux jeux peut mettre en péril les biens du joueur et impacter son patrimoine. Dans ce cas, une mise sous curatelle est une solution de protection qui limite les actes du joueur dans le but de protéger ses biens. Il est possible de faire la demande de mise sous curatelle soi-même, ou elle peut être faite par un proche de confiance. La demande doit être formulée auprès du juge des contentieux de la protection, en suivant la procédure décrite ici : https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F2094#:~:text=La%20curatelle%20est%20une%20mesure,une%20vente%20de%20bien%20immobilier. Le juge peut décider d’accorder ou non la curatelle après une audition (réalisée en général à domicile) de la personne concernée et/ou de la personne à l’origine de la demande, et désigner le curateur, qui est en priorité choisi parmi les proches de la personne à protéger. Il existe plusieurs niveaux de curatelle (simple, renforcée ou aménagée), qui permettent d’adapter la limitation des actes en fonction de chaque situation. Par exemple, une curatelle simple laissera la possibilité à la personne de gérer son compte bancaire alors qu’en cas de curatelle renforcée, la gestion du compte bancaire est réalisée par le curateur désigné.
» Liste des opérateurs de jeu agréés par l’ANJ : https://anj.fr/offre-de-jeu-et-marche/operateurs-agrees
» Les différents modérateurs de jeu (limites, auto-exclusion, interdiction volontaire de jeu) : https://anj.fr/les-moderateurs-de-jeu
» La démarche de demande pour mettre en place une curatelle : https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F2094#:~:text=La%20curatelle%20est%20une%20mesure,une%20vente%20de%20bien%20immobilier).
L’accompagnement par un professionnel de santé
Au-delà de ces différentes mesures graduelles qui permettent de se protéger concrètement de l’addiction aux jeux d’argent et de hasard, se faire accompagner par des professionnels de santé est une solution complémentaire importante. L’addiction aux jeux fait partie des addictions comportementales pour lesquelles il existe diverses prises en charge. De nombreux centres de soins partout en France sont en mesure de vous accueillir pour vous proposer une prise en charge spécifique. Vous pouvez retrouver un annuaire des centres de soins par région ici.
La prise en charge psychothérapeutique du jeu probématique inclut souvent un travail sur les distorsions cognitives liées au jeu. Il s’agit de fausses croyances qui incitent le joueur à persister dans son comportement : l’espoir de se refaire, les superstitions, les biais de probabilité (convictions inexactes sur le hasard comme penser qu’après plusieurs tours où le noir est sorti à la roulette, ce sera forcément le rouge au tour suivant), la mémoire sélective (se souvenir uniquement des « grandes victoires » mais pas des pertes qui sont pourtant plus nombreuses) … Il s’agit de la restructuration cognitive. Elle est indispensable pour vous aider à avoir des pensées plus adaptées à la réalité du jeu comme passer d’une pensée automatique (« si je joue, je me sentirai mieux ») à une pensée rationnelle (« j’ai tendance à oublier que je perds tout le temps aux jeux et qu’après je ne me sens pas bien du tout »). Elle permet de reprendre le contrôle, de faire des choix raisonnés, et de revenir systématiquement vers des interprétations différentes de celles qui vous arrivent automatiquement. Ce travail de restructuration est un travail qui doit être effectué sur le long terme pour en retirer tous les bénéfices. Il peut être réalisé avec l’aide d’un psychiatre ou d’un psychologue formé aux TCC (thérapies cognitives et comportementales).
Mais les thérapies, qu’elles soient en individuel et/ou en groupe, peuvent s’appuyer sur différents modèles psychothérapeutiques : thérapies cognitives et comportementales, mais aussi entretiens motivationnels, approches familiales, méditation pleine conscience… La prise en charge se fait, dans la majorité des cas, en ambulatoire. Des hospitalisations peuvent aussi être proposées si cela s’avère nécessaire. En complément d’une prise en charge psychologique et médicale, ces lieux permettent aussi de rencontrer une assistante sociale qui pourra vous aider en cas de difficultés financières.
D’autres stratégies thérapeutiques innovantes sont actuellement évaluées dans le cadre de recherches cliniques. Il peut s’agir d’approches médicamenteuses, comme avec le Nalméfène (médicament qui vise à réduire le craving), qui est actuellement expérimenté dans le cadre d’une recherche clinique portée par l’Institut Fédératif des Addictions Comportementales (IFAC) du CHU de Nantes et déployée dans plusieurs villes de France. Un autre traitement à l’essai est la psychothérapie assistée par les psychédéliques. Ce type de thérapie a été expérimentée avec succès dans le cadre du trouble de l’usage d’alcool. Un essai clinique pilote sur le jeu d’argent pathologique devrait démarrer en 2025 à l’IFAC du CHU de Nantes. Il s’agit de deux pistes de soins particulièrement prometteuses pour le traitement du jeu d’argent pathologique, qui pourrait venir compléter et améliorer l’arsenal thérapeutique déjà disponible.
Les groupes de parole, d’entraide et lignes d’écoute
Les accompagnements ne se limitent pas uniquement aux prises en charge thérapeutiques. Les groupes entre pairs sont un espace privilégié pour le partage d’expériences entre personnes qui rencontrent les mêmes problématiques. Parfois, la seule participation à ces groupes peut aider à initier un changement, sans passer par des soins plus traditionnels. Ils peuvent en effet être le lieu d’une prise de conscience, apportant un déclic à la personne qui a un jeu problématique, tout en assurant un espace bienveillant et sécurisant pour la libération de la parole. Ces espaces garantissent en effet la confidentialité de ce qui s’y dit.
Plusieurs formats existent :
- Des groupes de parole sont souvent organisés au sein des structures de soins. Ils représentent un espace de discussion libre, encadré par un ou deux professionnels. Ils peuvent aussi concerner l’entourage.
- D’autres groupes s’organisent directement entre pairs, en dehors des structures de soins, et peuvent aussi être un support précieux. Ainsi, les « Gamblers Anonymous » (ou « Joueurs anonymes »), se sont organisés sur le même modèle que les Alcooliques Anonymes (mouvement initié aux Etats-Unis). Ils se retrouvent en général dans les grandes villes, mais proposent également des réunions en visio pour ceux qui habitent en dehors.
Enfin, il existe aussi des lignes d’écoute dédiées pour les personnes concernées par un problème de jeu, ou leur entourage. La plus ancienne et connue est SOS joueurs, et une autre a été mise en place au moment de la loi de 2010 sur la légalisation des jeux en ligne en France : joueurs-info-service.fr.
Les coordonnées de ces groupes et lignes d’écoute sont disponibles dans la rubrique « lignes d’écoute et liens ».
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