Depuis quelques mois, fleurissent en France des boutiques de vente de dérivés du cannabiset plus particulièrement des produits riches en cannabidiol, le CBD. Les vendeurs l’appellent le « cannabis légal » : une formule pour dire le faux, lourde de sens et de conséquences. En effet, cette dénomination se veut rassurante pour les usagers mais incite probablement aussi à la consommation de ces produits. Elle laisse croire qu’il y aurait un cannabis légal non dangereux et un cannabis illégal. Vanté pour son absence de risque de dépendance, en oubliant ou en méconnaissant ses effets psychoactifs, le cannabidiol vendu dans ces boutiques « soulage, apaise mais ne soigne pas », un peu « comme de la camomille » rapporte une vendeuse d’une de ces boutiques.
Au-delà des questions réglementaires, récemment clarifiées par les autorités, et des intérêts commerciaux évidents, il est utile de faire le point sur ce que la science sait du CBD et permettre ainsi aux usagers de faire un choix éclairé.
Dérivé psychoactif de Cannabis sativa
Il existe plus de 100 composés cannabinoïdes dans un plant de Cannabis sativa. La molécule chimique dite cannabidiol ou CBD, identifiée en 1963, est la deuxième dans la plante en termes de concentration après le delta-9-tetrahydrocannabinol ou THC. On peut l’obtenir par extraction des fleurs mais aussi par synthèse, connue depuis 1969. Le mode d’action du cannabidiol n’est pas encore parfaitement connu mais il semble être différent du THC. Il module l’action dans le cerveau de nos propres substances endocannabinoïdes. Il va aussi interagir avec des systèmes impliqués dans la transmission de la douleur et activer certains récepteurs comme ceux de la sérotonine impliqués dans l’anxiété et l’humeur.
Son absorption par voie orale semble très mauvaise, d’où la multiplication des formes fumées ou « vapotées », qui permettent par ailleurs un effet plus rapide. Tout comme le THC, le CBD est très lipophile : il s’accumule dans les tissus gras, au premier plan desquels le cerveau. Ainsi, il faut être vigilant sur le risque d’accumulation de la substance dans le système nerveux, d’autant plus que son élimination est lente. Il peut, de même, modifier l’élimination de certains médicaments associés, avec des risques d’accumulation et de toxicité.
Le cannabidiol, avec ou sans THC
La cannabidiol n’est pas inscrit en France sur les listes des stupéfiants, des psychotropes ou des substances vénéneuses. Face à la multiplication des informations contradictoires, et souvent erronées, sur la réglementation du cannabis ou de certaines molécules cannabinoïdes en France, La Mission Interministérielle de Lutte contre les Drogues et les Conduites Addictives (MILDECA) a publié une mise au point sur la réglementation relative au cannabidiol. Il y est rappelé que tout produit contenant du cannabidiol extrait de la plante de cannabis est interdit. Sauf si celui-ci ne contient pas de THC, est extrait uniquement des graines et des fibres des plants de cannabis autorisés par le code de santé publique (feuilles et fleurs interdites), ne revendique aucune vertu thérapeutique et ne font pas l’objet d’une publicité sur de tels arguments. Le taux maximal de 0,2 % de THC très souvent évoqué par les vendeurs de CBD ne s’applique pas aux produits issus de la transformation des plants de cannabis autorisés. Or, des contrôles réalisés dans certains produits présentés comme contenant du CBD ont révélé la présence de THC.