Depuis les années 1970, le concept de « psychiatrie de liaison » fait référence à des équipes mobiles qui rencontrent les patients hospitalisés dans des unités non-psychiatriques, et leur proposent des évaluations psychiatriques, et si nécessaire, une amorce de prise en charge, et une orientation ultérieure vers des structures psychiatriques spécialisées. La psychiatrie de liaison a fait l’objet de nombreux travaux, et est traditionnellement rattachée au champ plus global de « médecine psychosomatique ». En l’an 2000, une circulaire ministérielle a mis en place dans l’Hexagone l’organisation des « Equipes de Liaisons et de Soins en Addictologie » (ELSA). Ces équipes sont habituellement séparées des équipes de psychiatrie de liaison. Cette séparation illustre les spécificités des ELSA, comme vient le rappeler cet article de synthèse paru en France dans la revue l’Encéphale.
En effet, les équipes ELSA rencontrent souvent des patients avec mésusages de substances, sans troubles d’usage caractérisés. Elles effectuent alors des interventions de prévention secondaire appelées interventions brèves, et que l’on ne retrouve pas en psychiatrie de liaison. Les ELSA effectuent par ailleurs un travail d’entretien motivationnel avec les patients atteints de trouble d’usage, approche destinée à façonner progressivement la demande de soins en fonction de la position initiale du sujet face à son addiction. Même si elles sont théoriquement adaptable en psychiatrie et même dans le champ global de la médecine, les techniques d’entretien motivationnel en addictologie sont assez spécifiques et les ELSA sont souvent rôdées à leur emploi.
De plus, les ELSA doivent former et conseiller les équipes non-addictologiques à la réalisation de bilans somatiques parfois complexes en lien avec le mésusage de différents types de substances. Cela peut aller du dépistage neurocognitif chez le patient alcoolodépendant au bilan virologique complexe chez le patient dépendance aux opiacés. Enfin, les ELSA peuvent faire du conseil pharmacologique dans la gestion de traitements addictologiques spécifiques, par exemple dans des situations de sevrage d’alcool ou bien de substitution aux opiacés. Toutes ces expertises sont uniques et justifient largement la spécificité des ELSA en tant qu’équipes de liaison autonomes.
Les consultations d’addictologie, plus encore que celles de psychiatrie, peuvent être complètement intégrées aux consultations d’autres spécialités, par exemple en hépatologie, en cancérologie, en pneumologie. Ce niveau d’intégration est également unique, et sort de l’intervention « à la demande » qu’on voit le plus souvent dans les équipes de liaison classiques, par exemple en psychiatrie ou en gériatrie.
Malgré toutes ces différences, les ELSA ont aussi de nombreux points communs avec les autres équipes de liaison, et partage avec la psychiatrie de liaison des populations souvent communes, et donc des interventions conjointes, qui nécessitent une bonne interaction en équipes, et une cohérence dans la réponse globale donnée aux équipes appelantes de soins somatiques. Si vous êtes membre d’une équipe ELSA, et/ou si l’activité de liaison vous intéresse, n’hésitez-pas à lire cet article qui s’inscrit dans une démarche actuelle plus globale de mieux définir et organiser l’intervention et les missions des ELSA dans les différents types de structures et de services où elles ont vocation à apporter leur expertise.