«Tout le monde fume des joints maintenant, c’est devenu banal» (libération)

Le nombre de consommateurs réguliers de cannabis augmente chez les jeunes, au point que de nombreux lycéens ponctuent leur journée de cours en fumant, parfois dès le matin. Exemple à Paris.

Cannabis
Alors qu’une troupe d’adolescents presse le pas le long de l’avenue Trudaine, dans le IXe arrondissement parisien, en direction de leur collège, deux garçons s’éloignent pour se mettre à l’abri des regards, dans l’optique de se griller un joint avant les cours. Mario (1) et Yanis ont 17 ans. A eux deux, ils comptabilisent plusieurs pétards par jour. Et ils commencent leur affaire dès le matin, aux alentours de 9 h 30. «Avant la classe ou après, dès qu’on a cinq minutes ou que le prof est en retard, c’est l’occasion de s’en fumer un, reconnaît Yanis, derrière ses lunettes embuées. Je ne compte pas franchement le nombre de pétards que je fume par jour. Tant que j’ai du matos, je roule, je fume. C’est comme ça que je calcule.» Malgré son insouciance affichée, Mario compte bien stopper un jour sa consommation de cannabis. «Même si j’ai eu des bonnes notes au premier semestre, il va falloir que j’arrête un jour. Je sais très bien que c’est nocif pour moi», reconnaît le jeune homme emmitouflé dans sa doudoune. La fumette le matin avant son heure de maths ? «Ce n’est pas un problème ! Je reste lucide», assure-t-il quand même. L’équation est plus compliquée pour son camarade. «Parfois je passe l’heure complètement dans mon délire», explique Yanis, tout en mimant un nuage de fumée autour de sa tête.

«Je fume à la pipe»

Aménagé sur les terrains de l’ancien abattoir de Montmartre, le square d’Anvers est le lieu de rendez-vous des collégiens et lycéens du quartier. Le parc, trait d’union entre le boulevard de Clichy, touristique et populaire, et l’avenue Trudaine, calme et cossue, est l’endroit parfait pour se poser à l’heure du déjeuner. Sous le kiosque à musique, une dizaine d’amis assis en tailleur s’amusent à se raconter leurs vacances de Noël en ce jour de rentrée des classes. Au milieu des éclats de rire et du son d’une enceinte poussé au maximum, des volutes de fumée s’échappent. Sous sa capuche, des Nike fatiguées aux pieds, Martin se considère à 15 ans comme un petit fumeur : «Ça fait seulement un an que je consomme. Et toujours avec mes potes.» C’est son ami Younès, 15 ans lui aussi, le connaisseur. Lui consomme depuis l’âge de 11 ans. «Mes parents sont des fumeurs de weed. J’ai testé la première fois lors d’une fête de famille, confie-t-il calmement. Depuis je n’ai pas arrêté. Je consomme parce que ça me fait plaisir. Je n’utilise pas ce produit comme un médicament.» Entre les Pasta Box et les boîtes de sandwich, les collages sont effectués à la va-vite et les joints tournent. «Je prends du shit[de la résine de cannabis, ndlr] ou de l’herbe. En ce moment, je fume à la pipe», dit-il tout en maniant frénétiquement son petit calumet en inox acheté sur Internet. Pour Younès, il ne reste que quelques minutes avant la reprise des cours. Et l’idée d’arriver dans les vapes en classe ne l’angoisse pas plus que ça. «Au contraire ! On a musique cet après-midi, ça m’aidera à mieux chanter», lance-t-il devant sa bande hilare.

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