TRIBUNE. « Donnons du cannabis médical à nos aînés qui en ont besoin pour passer la période de confinement »

Nos seniors, qu'ils soient en Ehpad, à l’hôpital ou à leur domicile devraient pouvoir recevoir temporairement cette substance dont les vertus thérapeutiques sont prouvées, plaident un collectif d'associations et de médecins.

Cannabis

Nous, associations d’usagers de cannabis à des fins thérapeutiques, médecins et travailleurs sociaux dans le champ des addictions, militants humanitaires, appelons solennellement le ministre de la Santé, Olivier Véran, le gouvernement d’Edouard Philippe et le président de la République Emmanuel Macron à rendre possible l’accès immédiat au cannabis à usage médical.

Il est choquant que nos anciens reçoivent force benzodiazépines, antidépresseurs, neuroleptiques et opioïdes (avec alcool ou pas), sans même que l’accès au cannabis à usage thérapeutique soit possible en cette période de confinement liée au Covid-19.

Le cannabis est pourtant indispensable pour les personnes âgées ou handicapées et pour tous les malades nécessitant ce type de prescription. On se fondera simplement sur la liste des pathologies validées (douleurs, spasmes, inflammation…) dans les nombreux territoires disposant déjà d’un accès légal (Canada, Israël, Allemagne, Suisse, Californie…) et sur les usages qui en sont faits quotidiennement dans les hôpitaux, les maisons de retraite et même les prisons.

Rappelons aussi que le centre médical Ichilov de Tel-Aviv vient de se lancer dans une étude visant à utiliser les propriétés anti-inflammatoires du cannabidiol (CBD) [cannabis débarrassé de ses effets psychoactifs, NDLR] pour lutter contre la réaction inappropriée de notre système immunitaire face au Covid. Réaction qui finit, dans bien des cas, par tuer le patient ou provoquer une forme grave de l’infection.

Autorisation temporaire d’utilisation

La France s’est engagée dans la voie du cannabis à usage médical, mais c’est un processus bien trop lent. Les personnes âgées et/ou handicapées résidant dans des établissements médico-sociaux sont dans l’urgence et très anxieuses face Sars-CoV-2. Tout comme le sont des personnes âgées et/ou handicapées isolées, qui pourraient bénéficier de prescriptions de leur médecin généraliste ou d’un gérontologue dans le cadre d’une autorisation temporaire d’utilisation (ATU).

En France, il est impossible d’avoir accès à des huiles, des gélules, des suppositoires ou à la vaporisation. Le cannabidiol seul ne peut suffire : il s’agit de fournir une palette de cannabinoïdes à des ratios variés. En effet, la présence de tétrahydrocannabinol [substance psychoactive du cannabis], de tétrahydrocannabivarine, de cannabigérol (CBG) et de certains terpènes est indispensable à l’obtention d’un effet anxiolytique, myorelaxant [relaxant musculaire], antalgique, antispasmodique, etc.

Les modalités pratiques de la production et de l’accès devraient être discutées, mais de nombreuses solutions existent, y compris sans aucun budget public, et pourraient être opérationnelles dans un temps très bref.

Nous le devons bien à celles et ceux qui ont déjà payé un si lourd tribut à la pandémie et qui vivent dans l’angoisse ou le désespoir.

Les signataires

Dr Patrick Aeberhard (ancien président de Médecins du Monde), Laurent Appel (Conseil National de la Résistance Cannabique), Rodrigo Arenas (militant associatif, 93), Pr Amine Benyamina (Centre d’Enseignement, de Recherche et de traitement des Addictions), Nicolas Bonnet (pharmacien de santé publique), Dr Anne Borgne (présidente du RESeau de Prévention des ADDictions), Anne Coppel (sociologue et chercheuse dans le champ des drogues), Jean-Pierre Couteron (psychologue addictologue, administrateur de la Fédération Addiction), Dr Jean-Michel Delile (président de la Fédération Addiction), Pr Didier Jayle (ancien président de la Mission Interministérielle de Lutte contre la Drogue et la Toxicomanie), Danièle Jourdain Menninger (ancienne présidente de la Mission Interministérielle de Lutte contre la Drogue Et les Conduites Addictives), Dr Bernard Kouchner (ancien ministre de la Santé), Dr Bertrand Lebeau Leibovici (Groupe de Recherche et d’Etudes Cliniques sur les Cannabinoïdes), Maëla Lebrun-Gadelius (directrice de l’association Bus 31/32, Marseille), Dr William Lowenstein (président de SOS Addictions), Victor Martin (association Plus belle la nuit, Marseille), Dr Béatrice Stambul présidente du Bus 31/32 et de ASUD Mars Say Yeah), Dr Christian Sueur (président du Groupe de Recherche et d’Etudes Cliniques sur les Cannabinoïdes).