Cannabis : " Je suis favorable à une légalisation régulée par l’Etat du cannabis" explique la députée Caroline Janvier.

La députée LREM du Loiret, Caroline Janvier, est la rapporteure d’une mission d’information sur la réglementation et l’impact des différents usages du cannabis. Pour Addict’Aide, elle répond à plusieurs questions sur le sujet.

Cannabis

Addict’Aide : Pourquoi avez-vous organisé une mission d’information commune sur le cannabis ?

Caroline Janvier : Malgré la loi de décembre 1970 qui structure notre modèle de prohibition et ses nombreuses révisions, le cannabis a toujours été présent dans notre pays. La classe politique ces 30 dernières années s’est penchée sur ce sujet sans que le débat politique ne sorte des caricatures, à l’exception du rapport Vaillant. On se souvient de la charge de Jean-Louis Debré sur la « gauche pétard » en réponse à la volonté de certains socialistes et écologistes d’avancer sur cette question.

Le cannabis fait depuis longtemps, et de plus en plus, partie du quotidien de nombre de nos concitoyens. Les personnes atteintes de maladies chroniques ou de cancers, qui trouvent en cette plante de nombreux bienfaits. Les consommateurs, qui cultivent ou qui s’alimentent auprès du marché noir. Les habitants des territoires marqués par les trafics et les élus locaux qui font comme ils le peuvent pour préserver l’ordre, la paix sociale et faire face aux légitimes mécontentements de leurs administrés. Les policiers qui luttent avec courage et sans discontinuer contre les trafiquants, mais qui ressentent en eux-mêmes de la lassitude face à l’ampleur du phénomène et à l’agilité des réseaux criminels. Ou encore les parents qui voient leur adolescent se murer progressivement et subir l’échec scolaire…

Cette mission d’information commune sur l’impact des différents usages du cannabis montre la volonté de ses membres d’embrasser l’ensemble des réalités que revêt le cannabis dans notre pays. Conscients du retard du politique face à des réalités vécues depuis de nombreuses années, il fallait poser les bases d’un exercice encore inédit sur l’ensemble des usages de manière dépassionnée et objective.

 

AA : Quels enseignements tirez-vous des travaux de cette mission ?

CJ : La question du cannabis et des drogues en général ne doivent pas faire l’objet d’approches idéologiques et manichéennes. Nous devons changer les termes du débat et nous intéresser à l’efficacité de nos politiques publiques en France au regard de plusieurs objectifs : la santé publique, la sécurité et la justice sociale. Ce qu’on voit au cours des nombreuses auditions, c’est un constat largement partagé de l’échec du modèle français à protéger nos jeunes, à lutter contre les trafics et la criminalité liée aux stupéfiants, à réduire les risques de la consommation et à construire une véritable politique de prévention dans notre pays.

Le cannabis est l’objet de fantasmes et d’amalgames. Nous nous attelons au sein de la mission d’information à objectiver chaque phénomène, chaque situation par des données et des faits, provenant de professionnels de terrain, d’experts et de scientifiques de divers domaines. L’idée n’est ni de faire la promotion du cannabis ni de banaliser sa consommation, ni d’ailleurs de le rendre responsable de tous les maux de la société. Mais de comprendre pourquoi en France, alors que nous avons sur le papier un des arsenaux législatifs les plus répressifs, la consommation augmente et est la plus forte des pays d’Europe. La mission d’information est ainsi l’occasion de porter notre regard à l’étranger pour analyser les forces et les faiblesses des expériences étrangères en matière de changements de législation.

 

AA : En tant qu’élue et à titre personnel, êtes-vous favorable à un changement du cadre légal de la consommation de cannabis dans notre pays ?

 Je suis favorable à une légalisation régulée par l’Etat du cannabis. Il faut que l’Etat reprenne le contrôle afin de construire une politique publique solide qui aurait pour objectif prioritaire la santé publique de nos jeunes et du reste de la population, et la lutte contre les trafiquants de drogues. Seulement près de 50 millions d’euros sont aujourd’hui consacrés à la prévention dans notre pays. Il est temps de changer de braquet et de donner les moyens nécessaires à ceux qui ont construit depuis de nombreuses années une expertise dans la lutte contre les consommations problématiques et les addictions. La régulation devra poser un cadre clair et rigoureux en matière de production, de distribution et de consommation du cannabis pour construire un véritable modèle français. Le rapport de la mission d’information permettra de proposer des outils concrets de réformes au regard des différents objectifs que nous souhaiterons atteindre à court, moyen et long terme.

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