Selon le rapport 2019 de l’Autorité de Régulation des Jeux en Ligne (ARJEL), les paris sportifs constituent d’ailleurs le principal moteur de la croissance du secteur. Et l’engouement du grand public en est l’une des principales raisons. Le nombre de joueurs actifs, plus de 3 millions, a ainsi presque triplé entre 2017 et 2019. Et c’est aussi dans les paris sportifs que le nombre moyen de comptes joueurs est le plus élevé : 1,47.
Nos adolescents, une population particulièrement vulnérable
Cet engouement touche aussi fortement les mineurs, majoritairement les garçons, de plus en plus nombreux à s’adonner à ce plaisir « sportif ». La dernière enquête Escapad de 2017, réalisée par l’Observatoire Français des Drogues et des Toxicomanies (OFDT), révèle en effet que le nombre des jeunes âgés de 17 ans qui déclarent avoir fait un pronostic en ligne a doublé entre 2011 et 2017. Ces chiffres très inquiétants devraient malheureusement être confirmés, voire renforcés, par les résultats de la prochaine enquête qui seront rendus publics en 2020.
Pourtant, depuis 2010 les mineurs n’ont pas le droit de prendre des paris sportifs. Et ce n’est pas par hasard ! Ils sont en effet plus vulnérables que les adultes aux émotions euphorisantes que ces paris procurent. Et selon l’Observatoire des jeux, parmi les moins de 18 ans qui ont joué au moins une fois au cours de l’année écoulée, un sur quatre peut être classé dans la catégorie des profils à « faible risque » et un sur dix à risque « problématique ».
Comment les opérateurs ciblent-ils les adolescents ?
Rien de plus facile pour un mineur que d’accéder à des paris sportifs en ligne grâce à son téléphone mobile ; 96 % des 12-17 ans en sont équipés(2). Et une fois connecté, les réseaux sociaux ne sont pas avares d’incitations à jouer.
Arrivé sur un site, la promesse de gains colossaux faciles à engranger et d’émotions fortes bien volontiers recherchées à cet âge, fait rêver. D’autant que les opérateurs proposent des offres de bienvenue très alléchantes qui encouragent à ouvrir plusieurs comptes afin de multiplier ses chances de gagner.
La froide réalité des chiffres est pourtant toute autre et l’ARJEL, à partir d’une analyse des données du marché agréé en ligne, affirme « qu’en 2018, toutes activités confondues, 85 % des joueurs ont été perdants et qu’en pari sportif, seulement 1,5 joueur sur 10 000 a gagné plus de 12 000 € (1 000 € par mois). Non seulement ces chiffres confirment que le jeu d’argent doit rester un loisir, une activité récréative pour laquelle le joueur est conscient que le gain est exceptionnel mais encore qu’il est faux d’affirmer ou de laisser penser qu’il est facile de gagner avec les paris sportifs des revenus réguliers et suffisants pour pouvoir en vivre. »
A la promesse du gain facile, s’ajoute un effet de groupe générationnel qui normalise et renforce l’envie de jouer, ce qui vient accroître le risque pour un jeune de développer une conduite à risque de plus en plus addictive.
Deux signes qui ne trompent pas
Dans la majorité des cas, c’est l’entourage qui va identifier la conduite addictive d’un proche. Pour les mineurs, les parents ont donc un rôle essentiel à jouer : celui d’être vigilant. Le dialogue est la base d’une relation constructive avec son enfant. Face aux paris sportifs, ne pas laisser l’adolescent livré à lui-même et échanger régulièrement avec lui sans dramatiser, ni banaliser, sur la réalité des gains pour les joueurs, peut-être le gage d’une prise de conscience pour lui.
Il y a deux questions à se poser pour savoir si le comportement de son enfant relève de l’addiction ou pas. Est-ce qu’il ne parie plus par plaisir, mais seulement pour rattraper ce qu’il a perdu, « se refaire » comme le disent les joueur eux même ? Vous ment-il ?
Les conseils d’un expert
Le professeur Philippe Nubukpo, psychiatre et addictologue et son équipe du Centre expert régional du jeu pathologique en Limousin, prodiguent de précieux conseils afin d’éviter que le jeu ne devienne un enfer pour le parieur(3) :
- se préparer à moins parier et ne pas se l’interdire brutalement,
- se laisser du temps entre un résultat et une nouvelle mise,
- se couper des sites de paris en ligne accessible 24h sur 24h et qui incitent à jouer par l’envoi régulier de notifications et de mails,
- trouver de nouvelles sources de plaisir par le biais d’activités physiques ou culturelles,
- regarder une rencontre sportive sans penser au pari,
- se fixer un budget et une limitation dans le temps de son utilisation.
(1) Rapport de l’Autorité de Régulation des Jeux en Ligne (ARJEL) – 2019
(2) Étude « Baromètre du numérique » du CREDOC – 2015
(3) Pour en savoir plus : https://www.lepopulaire.fr/limoges-87000/actualites/comment-reagir-quand-on-devient-accro-aux-paris-les-conseils-du-centre-expert-regional-du-jeu-pathologique-en-limousin_13751060/