L’impact des traits de personnalité dans le début de prise en charge en addictologie.

Une étude publiée dans Addiction Journal

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Image par Parentingupstream de Pixabay

Les « troubles duels » sont la manière moderne d’appeler les comorbidités entre troubles psychiatriques et troubles addictologiques. Toutefois, le terme de trouble duel dépasse la notion de comorbidité, car il constate que les formes associées sont plus que la somme de deux troubles, mais dépasse largement cette somme en termes d’impact psychosocial et sur le pronostic souvent beaucoup plus défavorable. Parmi les pathologies psychiatriques concernées, il y a bien sûr les troubles dits de l’axe 1 (dépression, psychoses, troubles anxieux…) mais aussi les troubles dits de l’axe 2, c’est-à-dire les troubles de personnalité.

La personnalité est l’un des principaux prédicteurs de l’engagement du patient dans les soins et influence donc les résultats de ces derniers. C’est particulièrement vrai dans les addictions, où on retrouve fréquemment des troubles de la personnalité qui peuvent être sources d’abandon des soins et de rechutes.

Il existe pourtant aussi un risque de sur-diagnostic de trouble de la personnalité chez les personnes souffrant d’addiction. Du fait d’une rigidification des comportements (nés d’une stratégie d’adaptation), des traits de personnalité pathologiques ou dysfonctionnels peuvent faire penser à tort à un trouble de la personnalité complet.

C’est pourquoi, afin de mieux percevoir le degré d’engagement du patient dans les soins d’addictologie, il pourrait être intéressant de déterminer certains traits de personnalité susceptibles d’avoir une influence, et de comprendre comment ils se sont mis en place (en fonction des représentations du patient, de l’identité qu’il a construite, des capacités qu’il a acquises, en interaction avec l’environnement).

Établir un profil de personnalité à partir de ces traits plutôt qu’un diagnostic de trouble de la personnalité complet permettrait d’adapter plus finement les soins, et d’éviter que le patient ne les arrête.

Cela pourrait aussi permettre de cibler les individus ayant des traits de personnalité plus à risque d’entrainer une rupture de soins afin de leur proposer rapidement un accompagnement adapté pour éviter le désengagement.

Dans cette étude multicentrique réalisée chez 338 patients hospitalisés en addictologie en Grèce pour un trouble de l’usage de substance, les chercheurs ont voulu savoir si des traits de personnalité dysfonctionnels étaient associés à un moins bon engagement dans les soins en début de prise en charge. Ils ont étudié plus particulièrement la relation avec le soignant, l’observance du traitement, et la satisfaction liée à la prise en charge. Des questionnaires de personnalité, et d’autres pour déterminer le niveau de motivation et d’engagement dans les soins ont été administrés durant la deuxième et la quatrième semaine de prise en charge.

Les résultats montrent que de bonnes capacités relationnelles, de self-control, de régulation de l’agressivité, de gestion émotionnelle, et un bon degré de fiabilité semblent prédire un meilleur rapport avec le soignant et une meilleure observance thérapeutique.

Des traits dysfonctionnels de personnalité dans ces domaines sont associés à une observance du traitement plus faible, et à un rapport moins bon avec le soignant.

Ainsi, la détermination des traits de personnalité pourrait aider à identifier précocement des obstacles potentiels à l’engagement du patient dans les soins d’addictologie, ce qui permettrait de mettre en place des stratégies pour les dépasser en pratique.

Par Julia De Ternay

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