En Amérique du Nord, les salles de consommations à moindre risque sont souvent appelées « sites de consommation supervisée » (SCS). Elles existent depuis plusieurs décennies au Canada et sont en train de se mettre en place aux États-Unis. Dans le contexte de l’ouverture de telles structures, il est localement toujours très important de tenir compte des besoins et des perceptions des parties prenantes concernées.
Les services d’intervention d’urgence jouent un rôle central dans la réponse aux situations d’overdose. Ici, les auteurs ont donc cherché à évaluer la façon dont les personnels de d’intervention d’urgence (PSU) percevaient la mise en œuvre potentielle d’un SCS dans leur environnement, et sur la façon dont ils pensaient que le projet de SCS devait être mis en œuvre.
L’étude a consisté en des entretiens approfondis menés par vidéoconférence avec 22 PSU, dont des pompiers, des ambulanciers paramédicaux, des policiers et des travailleurs sociaux du comté de King, Washington, États-Unis. Les données ont été analysées à l’aide d’une approche d’analyse thématique.
L’enquête montre que les participants exprimaient l’importance de se sentir en sécurité lorsqu’ils répondaient aux appels pour des situations où la consommation de drogues est impliquée, et ils soulignaient que le sentiment d’insécurité pouvait plus ou moins consciemment influencer le temps de réponse des PSU aux appels d’un SCS.
Les suggestions pour améliorer la sécurité perçue d’un SCS comprenaient la formation du personnel à la communication avec ces publics, notamment une formation à la désescalade, ainsi que l’aménagement du SCS pour accueillir les PSU dans de bonnes conditions. L’inadéquation du service des urgences en tant que point de soins pour les personnes qui utilisent des drogues a également été identifiée comme un sujet crucial, et certains participants ont exprimé leur intérêt pour que le SCS puisse devenir une destination alternative pour le transport. Enfin, l’appui au modèle SCS était conditionnel à l’utilisation appropriée des services d’urgence et à une réduction du volume d’appels. Les participants ont rappelé la nécessité d’une clarification des rôles et d’une recherche constante de collaboration comme des moyens d’assurer un partenariat approprié et de maintenir des relations de travail positives.
Cette étude et ses résultats montrent l’importance de l’approche collaborative dans le montage de projets de SCS ou de salles de consommation (en France, on dit désormais de HSA). Elle montre qu’aux USA, les intervenants de l’urgence médical, dans toute leur diversité, ne sont pas opposés aux interventions dans ces structures, mais qu’elles sont vigilantes à ce que leur partenariat soit bien construit. Les PSU ont apporté des idées nouvelles et intéressantes pour la prise en charge des overdoses, ce qui souligne encore une fois les bénéfices d’un montage le plus large possible.
Par Benjamin Rolland