Aux États-Unis, une large partie de la population (89%) consomme de la caféine, substance présente notamment dans le thé et le café, de façon quotidienne. Parmi ces consommateurs réguliers, 14% d’entre eux présententeraient une consommation excessive, dépassant largement la limite recommandée de 400mg par jour.
L’abus de caféine induit de nombreux effets désagréables, comme de l’anxiété, des insomnies, de la tachycardie, de l’incontinence urinaire, des troubles gastro-intestinaux et des complications pendant la grossesse. Même si les ravages du café sont probablement nettement moins évidents que ceux de l’alcool ou du tabac, l’abus de caféine est de plus en plus sérieusement considéré par certains auteurs comme une véritable addiction, et en présente en effet bien des aspects. Par exemple, il peut exister un syndrome de sevrage après un arrêt brutal de caféine, se manifestant par des céphalées, une fatigue, des difficultés de concentration, voire des symptômes pouvant faire penser à la grippe, une impossibilité de maitriser sa consommation même lorsqu’on le souhaite, et une poursuite de la consommation malgré l’apparition de conséquences négatives, comme l’impact sur la santé… Il existe à ce jour peu d’études portant sur ce domaine, et plus spécifiquement sur la façon de maitriser à nouveau les consommations lorsqu’elles sont devenues incontrôlables.
Dans cette étude parue récemment dans Drug & Alcohol Dependence (“DAD” pour les intimes), 36 « caféinomanes » volontaires et motivés à une réduction de leur consommation excessive de caféine ont été recrutés. Un manuel leur a été délivré individuellement, réunissant de nombreuses informations sur la caféine. Entre autres : dans quels aliments on trouve de la caféine, des conseils pour diminuer les consommations à l’aide de stratégies comportementales diverses, ainsi qu’une partie à remplir par le participant pour suivre l’évolution des consommations dans le temps.
20 semaines plus tard, la consommation de caféine dans ce groupe a été évaluée, à la fois lors d’un échange téléphonique et confirmée par des tests salivaires. Les résultats montrent une diminution drastique de la quantité de caféine ingérée. Le pourcentage de personnes consommant plus de 400mg de caféine par jour est ainsi passé de 86% à 10%.
On voit que si l’addiction à la caféine existe, elle est probablement moins envahissante que pour les produits plus classiques. On imagine mal un manuel faire passer de 86% à 10% le taux d’usagers à faible risque d’alcool dans une population de buveurs à risque. Il faut préciser toutefois que tous les participants de l’étude étaient volontaires et motivés à une réduction de l’apport de caféine, et conscients de leurs difficultés à y parvenir.
Par Julia d’Aviau de Ternay
Interne en psychiatrie à Lyon
& Benjamin Rolland
MCU-PH, Responsable de Service
Service Universitaire d’Addictologie de Lyon (SUAL)