Le point avec l’Institut fédératif des addictions comportementales (IFAC)
Qu’est-ce qu’un achat compulsif ?
A l’inverse d’un achat dit « sain », qui répond à un besoin (réel ou non) et peut être réalisé occasionnellement sous l’effet d’une impulsion, on parle d’achat compulsif lorsque l’acte d’achat se manifeste de manière excessive, irréfléchie et répétitive. Si un(e) acheteur/teuse compulsif(ve) peut ressentir une forme de plaisir, d’excitation et de soulagement lors de l’acte d’achat, il/elle éprouve généralement ensuite une forte culpabilité et des regrets d’avoir cédé à une pulsion irraisonnée.
La personne atteinte d’un trouble d’achat compulsif n’est pas en mesure de contrôler son comportement d’achat et agit de manière irrépressible, généralement sous l’impulsion d’émotions négatives (stress, colère, découragement…). Le trouble s’installe lorsque le comportement d’achat est répétitif et excessif, et qu’il s’accompagne d’une perte de contrôle sur le comportement et de conséquences qui retentissent négativement sur la vie personnelle (au niveau psychologique, financier, familial, social ou même professionnel).
Il s’agit d’une conduite addictive que l’on appelle également oniomanie ou achat compulsif pathologique. Ce trouble des achats compulsifs n’est pas reconnu par la classification internationale des maladies (CIM), mais on sait qu’il touche entre 3.4 % et 6.9 % de la population européenne.
Quelles sont les conséquences des achats compulsifs ?
Les difficultés financières sont en général au premier plan et peuvent conduire au surendettement, voire même à des comportements délictueux visant à renflouer les dépenses excessives (vols, détournement d’argent, etc.) dans les cas les plus extrêmes.
Mais un trouble d’achats compulsifs entraîne également un isolement social et familial. La vie de l’acheteur compulsif est en effet centrée autour des achats, pas tant sur les objets acquis (comme cela pourrait l’être pour un collectionneur par exemple), qui ne sont pas nécessairement utilisés d’ailleurs, mais plutôt sur le fait d’acheter en lui-même. Les difficultés psychologiques associées à ce trouble sont nombreuses, et comprennent notamment une culpabilité et une honte importantes, qui peuvent conduire à des états anxieux et dépressifs, voire même au suicide.
Quelles sont les causes des achats compulsifs ?
Comme pour tout trouble addictif, les causes peuvent être multiples. On sait cependant que ce trouble est particulièrement associé à une faible estime de soi et des difficultés à réguler ses émotions. Le comportement d’achat survient ainsi généralement lors de l’apparition d’une émotion négative, l’objectif immédiat étant de lutter contre cette émotion négative et de la transformer en émotion positive, même de très courte durée. Les émotions induisant ce processus sont notamment la colère, l’anxiété, le découragement, le manque, l’ennui, la culpabilité ou encore la frustration.
Cette difficulté à gérer les émotions et/ou cette faible estime peuvent venir d’un traumatisme, d’une relation dysfonctionnelle provoquant un manque de confiance en soi ou de manques émotionnels identifiés dans l’enfance ou la préadolescence. L’éducation reçue est aussi importante, lorsque des valeurs matérialistes fortes (importance donnée aux possessions pour valoriser la réussite sociale, achats visant à consoler ou récompenser, etc.) sont inculquées dès le plus jeune âge.
Il est important également de prendre conscience qu’au-delà des facteurs liés à l’individu, l’environnement joue un rôle important. En effet, dans la société de consommation actuelle, les sollicitations en ligne sont de plus en plus fréquentes et les occasions d’achats faciles et rapides. Cette possibilité permanente d’acquisition de produits divers et variés, notamment via Internet et les applications smartphone, accentue la difficulté à gérer cette addiction pour les personnes qui en souffrent.
Enfin, comme beaucoup de troubles addictifs, les achats compulsifs sont souvent concomitants avec d’autres troubles psychiatriques, comme un trouble anxieux, un trouble dépressif, ou encore un trouble de stress post-traumatique. L’association des troubles peut amplifier le comportement d’achats compulsifs, mais la prise en charge du ou des trouble(s) psychiatrique(s) associé(s) aide généralement à améliorer en retour le trouble d’achats compulsifs.
Comment savoir si je souffre d’achats compulsifs ?
Le trouble des achats compulsifs est souvent sous-identifié par les personnes qui en souffrent, qui pensent fréquemment qu’il s’agit d’un vice ou d’une personnalité dépensière présente depuis toujours. Pourtant, il est important de prendre conscience de son trouble et de demander de l’aide lorsque c’est nécessaire, afin d’éviter l’accumulation de conséquences négatives et l’aggravation du trouble.
Les signes qui doivent vous alerter sont les suivants :
- Vos achats impulsifs sont très répétitifs et occupent une grande partie de votre temps ;
- Vos dépenses sont excessives par rapport à vos ressources, vous êtes constamment en difficultés financières du fait de vos achats ;
- Les produits que vous achetez s’entassent dans vos placards et vous ne les utilisez pas ;
- Vous avez l’impression d’avoir perdu le contrôle sur votre comportement d’achats ;
- Vous achetez souvent pour lutter contre vos émotions négatives, et vous ressentez de la honte et de la culpabilité après vos achats ;
- Vous êtes souvent en conflit avec votre entourage pour des questions d’argent, les autres critiquent vos habitudes d’achats.
Si vous vous reconnaissez dans cette description, il est important de consulter un psychiatre ou un psychologue, qui pourra confirmer ou non la présence du trouble, mais aussi dépister d’éventuels d’autres troubles associés et mettre en place une prise en charge adaptée.
Que faire pour limiter les achats compulsifs ?
Si les achats compulsifs peuvent se manifester tout au long de l’année, certaines périodes sont particulièrement à risque. C’est le cas des périodes de soldes durant lesquelles les sollicitations sont toujours plus nombreuses. Pour réussir à limiter les achats impulsifs, il est possible de mettre en place soi-même quelques astuces.
En premier lieu, vous pouvez vous appuyer sur certaines astuces techniques. Par exemple, n’emportez pas avec vous de moyens de paiement dématérialisés (comme une carte bancaire ou même un chéquier) et obligez-vous à régler en espèces. Ceci vous permettra de prendre plus concrètement et facilement conscience des sommes dépensées. En effet, la dématérialisation de l’argent participe au fait de ne pas se rendre compte de la portée des achats et de leurs conséquences financières. De la même façon, lorsque vous achetez en ligne, évitez d’enregistrer votre carte bancaire en ligne, car toutes les étapes ajoutées dans le processus d’achat vous donneront du temps pour remettre en question la pertinence de l’achat. Par ailleurs, dans la plupart des applications bancaires, vous pouvez aussi définir un plafond de paiement sur votre carte bancaire pour limiter vos dépenses en fonction de vos ressources, ou désactiver les modes de paiement facilités (sans contact, sur mobile ou sur internet). De manière générale, consultez régulièrement le solde de votre compte et les transactions qui y sont réalisées de manière à en prendre conscience et à réagir au bon moment.
Dans un deuxième temps, vous pouvez mettre en place des actions vous aideront à lutter contre les envies irrépressibles d’achats. Par exemple, lorsque vous vous apprêtez à acheter, respirez d’abord profondément et recentrez-vous sur vous-même, ancrez-vous dans le moment présent en vous concentrant sur votre respiration. De plus, posez-vous systématiquement quelques questions avant d’acheter :
- Avez-vous réellement besoin de ce nouvel objet ?
- Avez-vous les moyens de l’acheter sans vous mettre en difficulté financière pour la fin du mois ?
- Allez-vous réellement l’utiliser ?
Pour être sûr de répondre objectivement à ces questions, laissez-vous une nuit de réflexion afin de ne pas céder à la précipitation, génératrice de regrets.
N’hésitez pas à consulter notre guide « Comment se protéger des risques liés aux pratiques potentiellement addictives ? Les bons réflexes » dans la boite à outils de l’Institut Fédératif des Addictions Comportementales (IFAC). Vous y trouverez de nombreux conseils pour se protéger des comportements addictifs.
Comment se soigner ?
Si tous ces conseils ne suffisent pas, que vous avez perdu le contrôle sur votre comportement d’achats et en éprouvez une souffrance importante, n’hésitez pas à en parler à vos proches et à solliciter l’aide d’un professionnel de santé. Retrouvez ici un annuaire des centres de soins spécialisés dans la prise en charge des addictions comportementales par région.
Il est en effet important de prendre conscience de votre trouble, de comprendre ce qui déclenche l’acte d’achat, de travailler sur les valeurs de vie, la gestion des émotions ou la perception de soi. La prise en charge médicale et psychothérapeutique spécialisée des achats compulsifs est en général réalisée dans les services d’addictologie.
L’important est d’oser en parler et de faire la démarche de contacter un service spécialisé ou un groupe d’entraide. Il existe des groupes de partage et de soutien sur le modèle des Alcooliques Anonymes : « Les débiteurs Anonymes ».
Liens utiles :
- Site Internet des Débiteurs Anonymes
- Guide pratique « Comment se protéger des risques liés aux pratiques potentiellement addictives ? Les bons réflexes »
- Annuaire des centres de soins spécialisés
Retrouvez le guide pratique « Achats compulsifs, comment limiter les risques, notamment en période de soldes ? » sur le site de l’Institut Fédératif des Addictions Comportementales (IFAC) du CHU de Nantes.