Augmentation de l’utilisation de cyberpornographie pendant la pandémie de la COVID-19

Autres addictions comportementales

Internet a été de plus en plus utilisé durant la pandémie, du fait de confinements, de couvre-feux ou de modifications des conditions de travail. Des millions de personnes ont pu bénéficier des différentes fonctionnalités de cet outil, offrant autant d’avantages que d’inconvénients. Certaines applications semblent avoir particulièrement été visitées et notamment les sites à caractère pornographique.

C’est sur l’un d’entre eux que se focalise une étude interculturelle publiée en Mars 2021 dont les auteurs sont issus de pays différents (Etats-Unis, Inde, Italie, Niger, Nouvelle-Zélande, Pakistan). Dans cet article scientifique est d’abord présenté l’impact de l’isolement des individus sur leur utilisation excessive d’Internet. L’addiction à Internet est alors décrite et se caractériserait par des préoccupations excessives ou difficilement contrôlées, des envies irrépressibles ou d’autres comportements induisant une altération du fonctionnement ou de la détresse.

L’addiction à la pornographie, phénomène déjà largement reconnu, se confronte depuis des années à celui d’addiction à la pornographie sur Internet ou cyberpornographie. Celle-ci serait considérée parfois comme un trouble obsessionnel-compulsif (étant associé à de l’anxiété) ou comme une addiction (plus axée sur le système de récompense). La neurobiologie a déjà permis de répondre en partie à cette controverse, en mettant en lumière des différences en termes de gènes ou d’activités cérébrales et notamment en lien avec le circuit du système de récompense chez les personnes à risque d’addictions sur Internet. Les auteurs de l’étude rappellent le pouvoir addictif de la pornographie en partie car le système de récompense subit une plus forte activation. Pourtant l’addiction à la pornographie n’est pas encore reconnue comme un trouble mental dans les classifications internationales, expliquant pourquoi celle à la cyberpornographie ne peut l’être.

Pornhub est l’un des sites pornographiques les plus consultés au monde. Le partage de certaines de leurs données a mis en avant une augmentation atypique des utilisations du site, et plus particulièrement dans les pays ayant bénéficié de mesures du type « Restez chez vous / Stay home ». Cette période a limité les possibilités en termes d’activités sexuelles, et les sites à caractère pornographique peuvent apparaitre comme une solution de substitution, d’évasion ou de facilité. Un tableau montre ainsi le pourcentage moyen d’augmentation de l’utilisation de Pornhub par pays, variant de 23,2% aux Etats-Unis à 95,3% en Inde. En France, la progression était de 38,2%. Dans ce pays comme en Italie, Pornhub a d’ailleurs offert des services habituellement payants à ses utilisateurs pendant la pandémie. Qui plus est, dans de nombreux pays, l’utilisation de VPN (permettant d’être plus anonyme) a également augmenté, conjointement avec l’utilisation de Pornhub.

Les auteurs proposent des recommandations pour limiter l’addiction à la cyberpornographie, avec un recours fréquent au réseau social (famille, amis) et à d’autres activités (physique, artistique ou intellectuelle) et en limitant son temps d’utilisation d’écran. Ils font également un état rapide des prises en charge efficaces en cas d’addiction à Internet. Cette étude met en avant l’augmentation de la consommation d’un site à caractère pornographie du fait de la pandémie de la COVID-19 et ouvre la réflexion sur les évolutions sous-jacentes à cette crise dans l’émergence de problèmes liés à l’utilisation grandissante des écrans.

Par Stéphanie Laconi

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