Les écrans et la consommation qu’en font certains enfants posent-ils un problème ? Question corollaire : que font les parents ? Que font les pouvoirs publics, répond plutôt Claude Martin, sociologue, directeur de recherche au CNRS, titulaire de la chaire Enfance, bien-être, parentalité à l’Ecole des hautes études en santé publique, auteur notamment de l’ouvrage Etre un bon parent, une injonction contemporaine (1) et Accompagner les parents dans leur travail éducatif et de soins (2).
Les écrans sont accusés de fabriquer des petits crétins pour paraphraser le titre du livre du spécialiste en neurosciences cognitives Michel Desmurget. Cette façon de dénoncer un danger vous surprend-elle ?
Il y a une certaine convergence des avis scientifiques sur les dangers pour les enfants d’être confrontés précocement à dose intensive aux écrans. On peut d’ailleurs noter que même le fondateur d’Apple, Steve Jobs, avait fini par avouer qu’il limitait le plus possible l’utilisation des smartphones et des tablettes pour ses propres enfants.
L’ouvrage de Michel Desmurget, la Fabrique du crétin digital, vient s’ajouter au rayon déjà très fourni des livres qui interpellent les parents. Et forcément susciter une certaine angoisse, alors que dans le même temps, l’Education nationale, notamment avec son «plan tablettes», fait d’une certaine façon passer le message qu’il n’est jamais trop tôt pour familiariser les enfants avec le monde numérique… Les parents qui veulent que leur enfant réussisse (autrement dit tous les parents) se retrouvent donc face à des injonctions contradictoires. Surtout quand Michel Desmurget va jusqu’à recommander zéro écran avant 6 ans. Le moins que l’on puisse dire, c’est que cela ne va pas être facile…
Y a-t-il eu d’autres diabolisations de ce type auparavant ?
Oui, à commencer par la télé, la folle du logis. Elle était aussi considérée au départ comme un danger, accusée de faire mal aux yeux, d’abêtir, de rendre fainéant, ou encore d’être un outil de propagande et de manipulation… Mais les «paniques morales» de ce genre sont légion. Pratiquement à la même époque, on a craint que le rock’n’roll et ses déhanchements ne menacent les jeunes ou ne les incitent à devenir tous d’affreux blousons noirs.
Voir la suite de l’interview sur le site de Libération.