Et si les ondes pouvaient aider à réguler les comportements de boulimie ? Une étude pilote de stimulation magnétique transcranienne publiée dans The International Journal of Eating Disorders

La prise de décision et le contrôle inhibiteur sont deux processus neurocognitifs particulièrement impliqués dans les symptômes de boulimie, en particulier dans le déclenchement des crises. Ces processus sont utilisés en permanence dans la vie de tous les jours, car ils nous permettent de faire certains choix plutôt que d’autres.

Autres addictions comportementales

La boulimie est un trouble mental rentrant dans le cadre des troubles du comportement alimentaire. La boulimie se caractérise par des épisodes de prises alimentaires massives (hyperphargie), suivis de vomissements provoqués, lesquels sont destinés à éviter la prise de poids. La boulimie est souvent source de souffrance psychologique majeure, avec des répercussions socio-environnementales parfois très invalidantes, et des risques physiques parfois très importants, notamment en raison des pertes de potassium résultant des vomissements provoqués. Le trouble hyperphagique compulsif (sans vomissements provoqués) et la boulimie sont souvent considérés, sinon comme appartenant au champ des addictions, du moins très proches sur le plan clinique et physiopathologique.

La prise de décision et le contrôle inhibiteur sont deux processus neurocognitifs particulièrement impliqués dans les symptômes de boulimie, en particulier dans le déclenchement des crises. Ces processus sont utilisés en permanence dans la vie de tous les jours, car ils nous permettent de faire certains choix plutôt que d’autres. Ces deux fonctions sont régulées par une zone bien particulière du cortex préfrontal : le cortex frontal dorso-latéral. Depuis quelques années, des études ont montré que ces fonctions sont altérées dans les pathologies addictives, avec comme conséquence une dérégulation de certains comportements de contrôle, que ce soit dans les addictions, la boulimie, ou même d’autres comportements comme les conduites suicidaires.

Les techniques de stimulation cérébrale non-invasive utilisant les ondes magnétiques, c.à.d. la stimulation magnétique transcrânienne (rTMS en anglais), pourraient moduler ces fonctions de prise de décision et de contrôle, et ainsi permettre une amélioration de ces différents troubles, notamment la boulimie.

Dans cette étude randomisée publiée dans l’IJED, la principale revue internationale sur les troubles du comportement alimentaire, des chercheurs ont recruté 40 volontaires souffrant de boulimie, et les ont séparés en 2 groupes. Le premier groupe a reçu une « fausse » stimulation transcrânienne sans le savoir (stimulation « placebo »), tandis que le deuxième groupe à reçu une réelle stimulation par les ondes magnétiques du cortex dorso-latéral gauche.

Tous les volontaires ont eu en tout dix séances de stimulations (réelles et placebo) réparties sur deux semaines, ainsi que plusieurs tests neurocognitifs avant les séances et après la dernière séance, pour mesurer leur attention, leur prise de décision, leur contrôle inhibiteur.

Les résultats montrent une amélioration du contrôle inhibiteur uniquement dans le groupe ayant reçu les stimulations magnétiques transcrâniennes. Ces résultats ne sont en revanche pas corrélés avec une réduction des comportements boulimiques. Cependant, il est possible que l’étude n’ait pas comporté assez de participants pour montrer une modification visible de ces comportements. Il est aussi possible que l’effet des stimulations ne soit effectif qu’après une période un peu plus longue, non-visible étant donné l’absence de suivi après l’étude.

Même s’il existe aujourd’hui encore assez peu de données sur l’intérêt de cette thérapie dans l’amélioration des comportements impulsifs, les recherches sur la stimulation magnétique transcrânienne sont prometteuses, et la boulimie pourrait faire partie des domaines à en bénéficier.

Julia D’AVIAU DE TERNAY (interne en psychiatrie à Lyon)

Benjamin ROLLAND (MCU-PH en addictologie, SUAL, Lyon)

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